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L’innovation navale de défense est décidément en plein boom. Après une semaine pendant laquelle j’ai pu parcourir l’excellent salon Euronaval 2018 et découvrir de véritables innovations sur les stands des grands, des moins grands, et des tout petits (notamment au sein de l’exposition Seannovation), un petit retour sur une nouvelle de début octobre, passée relativement inaperçue.

Le sujet ? Un projet chinois baptisé Guanlan (traduction approximative : « observer les grandes vagues ») qui vise à développer un satellite LIDAR capable de détecter les sous-marins en plongée. En premier lieu, et pour bien expliquer le concept, je me permets un petit rappel sur le LIDAR.

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Pour faire simple, un LIDAR est un radar qui émet des impulsions à fréquences très élevées, dans le spectre visible ou infrarouge des ondes électromagnétiques, en utilisant généralement un laser. L’acronyme LIDAR signifie « light detection and ranging » (le « r » de radar signifiant quant à lui « radio »). Si l’on en parle beaucoup aujourd’hui (toutes les voitures autonomes utilisent un LIDAR – p.ex illustration ci-dessus), cette technologie est en réalité relativement ancienne. Elle a été développée dans le domaine spatial dans les années 70: sa première application était l’établissement d’une cartographie de la Lune lors de la mission Apollo 15.

Le LIDAR est également utilisé en archéologie, pour permettre de cartographier une zone en révélant ce qui se cache sous la surface. Et, bien entendu, sous l’eau.

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Le projet Guanlan repose sur l’émission d’impulsion laser de différentes couleurs (donc de différentes fréquences) permettant de détecter des cibles à différentes profondeurs.

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L’idée est de scanner une bande de 100km de large, tout en étant capable de focaliser le faisceau sur un rectangle de 1km de large. La question : comment détecter un sous-marin caché dans une zone d’une telle taille ?

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L’équipe chinoise a donc dévoilé sa stratégie : coupler le LIDAR à un radar micro-ondes, capable de mesurer le mouvement de la surface de manière extrêmement précise. Le radar recherche ainsi les perturbations de la surface de l’eau qui pourraient témoigner de la présence d’un sous-marin immergé, afin de pouvoir focaliser le faisceau laser sur l’emplacement de la cible présumée.

Le faisceau se focalisera sur la thermocline, c’est-à-dire la couche dans laquelle on observe une inflexion brutale de la température, c’est à dire la frontière entre une masse d’eau froide, profonde et une masse d’eau superficielle plus chaude. Cette zone est généralement exploitée par les sous-marins afin d’éviter la détection (les ondes sonar se propageant différemment en fonction de la thermique sous-marine).

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Les chinois annoncent une détection théorique jusqu’à une profondeur de 500m. Le satellite serait en cours de développement (comme à l’accoutumée, il faut prendre les déclarations chinoises avec une certaine prudence) par plus de 20 instituts chinois disséminés sur le territoire. L’institut responsable du projet serait le Pilot National Laboratory for Marine Science and Technology situé à Qingdao (sud-est de la Chine).

Maintenant, une certaine prudence s’impose, surtout si l’on considère que cette technologie a déjà été examinée dans un tel contexte, notamment mais non exclusivement par la DARPA (voir par exemple le Deep Sea Operations Program) avec des résultats mitigés . Il conviendra également de se poser la question de la sensibilité aux conditions de surface et de mer, ou à la présence d’organismes vivants comme les bancs de poissons. Quid également de la turbidité de l’eau, ou de la présence de nuages (puisque le laser est déporté en orbite)…  Enfin, les LIDAR peuvent être diffractés, notamment lorsqu’ils traversent des milieux de températures ou de salinité différents – les expérimentations réalisés par les Etats-Unis ou la Russie n’ont pas été concluants au-delà de 200 m de fond. Alors même si le Laser semble développé par le très sérieux institut Xian Institute of Optics and Precision Mechanics Institute, percer la mer par 500m de fond semble très complexe, voire impossible.

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En tout cas, encore une nouvelle annonce provenant de la Chine et destinée à démontrer le sérieux de la volonté du pays à s’imposer comme une superpuissance technologique militaire comme en témoigne (mais ce sera pour un nouvel article) le projet Deep Blue Brain destiné à développer un ordinateur exaflopique (1000 fois plus puissant que le plus puissant superordinateur actuel) avant 2020.

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Pour ceux qui – et j’en suis – sont des fervents fans du film de John Mac Tiernan « A la poursuite d’Octobre Rouge », tiré du livre de Tom Clancy et décrivant la défection d’un commandant de l’Octobre Rouge, sous-marin nucléaire russe de dernière génération muni d’un nouveau système de propulsion silencieux appelé « la chenille », voici une nouvelle intéressante et qui relance la course aux armements sous-marins.

En matière de propulsion sous-marine innovante, peu de pays comptent. Il y a bien évidemment les Etats-Unis et la Russie, la Grande Bretagne, la France, mais aussi, et c’est une nouveauté, la Chine qui annonce une technologie révolutionnaire susceptible de rendre les sous-marins de l’Empire du milieu virtuellement indétectables par les techniques conventionnelles.

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Baptisé IEPS pour Integrated Electrical Propulsion System, et comme son nom l’indique, il s’agit d’un système de propulsion électrique silencieuse, fondée sur le principe de l’hydrojet. Pour être précis, il s’agit d’un « rim-driven pump-jet », que l’on pourrait traduire (je ne suis pas un expert) par « turbine à hydrojet sans axe ». En gros, les pales sont encapsulées dans un anneau, il n’y a pas d’axe, c’est l’anneau qui constitue le rotor du moteur électrique. Il est entouré d’un autre anneau, qui constitue le stator, le complexe rotor/stator étant étanche et scellé.

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Les avantages : une maintenance facilitée car le propulseur comporte moins de composants mouvants, une conception compacte, mais surtout une réduction drastique de la cavitation et des vibrations, donc de l’empreinte sonore. Le Graal de la propulsion sous-marine militaire, donc. Nota: comme on me l’a justement reproché, j’ai trop simplifié dans la version initiale de l’article: la cavitation hydrodynamique est donc la formation de bulles de vapeur dans l’eau par l’action mécanique de l’hélice (théorème de Bernoulli), soit la vaporisation de l’eau par la baisse de pression générée par le mouvement (en gros, la pression du liquide est abaissée au-dessous de sa pression de vapeur saturante, ce qui amène le liquide à ébullition). Les bulles étant transitoires, puisque leur apparition élimine les conditions qui leur ont donné naissance, cela amène à l’implosion des bulles de vapeur, ce qui crée une onde de choc notamment sonore, aisément repérable au sonar.

Ce n’est pas en soi un nouveau concept : les premiers propulseurs de ce type ont été mis sur le marché en 2010 notamment par des sociétés allemandes ou néerlandaises, comme « pods » auxiliaires de propulsion. Dans le cas chinois, le système IEPS est à la fois un système de propulsion, et un système de génération d’énergie électrique. Selon l’Etat-Major de la Marine Chinoise (PLAN), l’objectif d’IEPS était également de pouvoir emporter à bord le système d’armes « high-energy radio-frequency » (HERF), une arme à énergie dirigée qui nécessite une puissance électrique importante pour fonctionner.

Ce qui différencie la solution chinoise des systèmes préexistants, en tout cas d’après leurs (rares) annonces, c’est la performance – ce type de systèmes étant jusqu’alors peu efficaces, et limités à une propulsion auxiliaire. Visiblement, la Chine semble avoir injecté des financements suffisants (un sujet sensible chez nous en ce moment, comme quoi la recherche…) pour disposer d’un système véritablement efficace, en maîtrisant la complexité de sa conception.

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Les ingénieurs américains travaillent sur de tels systèmes depuis environ 20 ans mais s’orientent sur des principes différents, comme les moteurs de type « permanent magnet » (moteur à aimant permanent) développés par General Dynamics, ou à superconducteurs (high-temperature superconducting (HTS) synchronous motors) développés par General Atomics et American Superconductors. Le destroyer de classe Zumwalt dont nous avons parlé notamment dans cet article utilise un tel moteur à induction, ainsi que les sous-marins de la classe Virginia ou de type 212 (avant les futurs Columbia – américain, ci-dessous – et Dreadought – anglais – prévus pour 2031).

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La Chine compte équiper du système IEPC ses futurs sous-marins nucléaires lanceurs d’engins, de type Tang-Class 096 – voir ci-dessous la comparaison entre le type 096 en haut et son prédécesseur le 094 en bas.

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Ce sont des bestioles capables de lancer 24 missiles balistiques intercontinentaux  JL-3. La Chine compte également équiper ses sous-marins nucléaires d’attaque de type 095.

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La Chine a ainsi construit la plus grande base de sous-marins en Asie, à Yulin, avec une volonté de l’utiliser (elle comporte un tunnel sous-marin) pour envoyer discrètement ses engins en échappant à la surveillance satellite – d’où le besoin d’un système de propulsion furtif.

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Toutefois, les experts – notamment américains – semblent sceptiques sur la véracité des déclarations chinoises ; sans toutefois expliquer clairement pourquoi. Il est clair que si la Chine a réussi à développer un tel système de propulsion électrique haute performance furtive, il s’agirait d’un avantage stratégique conséquent. Ce qui amène aujourd’hui les Etats-Unis, en particulier, à considérer une accélération de leur programme de détection et de lutte sous la mer, afin de détecter, pister et identifier ces nouvelles menaces… tout en soulignant (et c’est un peu amusant)… le risque de collision accidentelle avec un sous-marin chinois « trop furtif ». On croit rêver.

Si le programme est réel, et les progrès confirmés, les sous-marins chinois équipés pourraient connaître leur premier déploiement opérationnel en 2020.

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Il y a quelques temps j’avais parlé dans ce blog du premier satellite utilisant le principe d’intrication quantique des photons pour réaliser une transmission cryptée (voir cet article). Cette fois-ci, il ne s’agit plus de cryptographie, mais d’une technologie plus directement opérationnelle : un radar tueur de furtivité.

Bon, je préviens tout de suite, nous sommes encore une fois dans le domaine quantique, donc dans un domaine parfaitement contre-intuitif, et mon effort de vulgarisation (surtout si l’on considère que je ne suis pas physicien) risque de m’attirer les foudres des experts. Désolé donc.

Le principe du radar quantique repose lui aussi sur le principe de l’intrication des photons, une propriété surprenante à l’échelle quantique. Pour faire simple, en physique quantique, l’état d’une particule est décrit par une « fonction d’onde ». Celle-ci correspond au spin de la particule (son moment cinétique, classiquement représenté par une flèche vers le haut ou le bas) et qui lui-même correspond à une superposition d’états. A l’échelle quantique, le spin est en effet une somme des états « vers le haut » et « vers le bas ».

Mais lorsqu’on mesure l’orientation du spin, la fonction d’onde est modifiée (« réduite ») de telle sorte que la superposition d’états disparaît et le spin observé prend, de façon aléatoire, la valeur « haut » ou la valeur « bas ». Pour l’instant, c’est encore compréhensible. Ça devient plus complexe lorsque l’on considère qu’en physique quantique, on peut avoir une généralisation de la superposition d’états à plusieurs particules. En l’occurrence, considérons 2 photons dits « intriqués » : ce sont deux particules dont les spins sont opposés. Même si ces particules sont spatialement éloignées, si l’on mesure le spin de la première, la seconde prend instantanément une valeur de spin opposée. Oui je sais, c’est bizarre. Mais c’est comme ça.

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Le radar chinois repose sur ce principe. L’astuce est d’utiliser la polarisation du signal radar comme une signature quantique. Un photon est séparé, via un dispositif optique, en un couple de photons intriqués. Le radar va ainsi générer un faisceau de photons A, et un faisceau de photons B, intriqués. Les photons B sont surveillés constamment (là encore, vous comprenez que je simplifie), alors que le faisceau A est envoyé en direction de la cible. Si la fonction d’onde du faisceau B se modifie, cela signifie que le faisceau de photons A a atteint une cible, ce qui a provoqué une modification de son spin, et ainsi modifié instantanément celui du faisceau B intriqué.

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L’intérêt, c’est que cette modification est indépendante de la forme de la surface heurtée. La furtivité classique consiste à minimiser la surface équivalente radar en supprimant autant que possible la réflexion des ondes en direction du radar. Mais dans le cas d’un radar quantique, il ne s’agit pas de détecter une onde réfléchie, mais de détecter une modification de l’état d’un faisceau de photons. Les stratégies classiques de furtivité sont donc inefficaces, comme le sont les contre-mesures de brouillage : le radar quantique n’utilise pas d’ondes ! De plus, l’interaction du faisceau de photons avec la cible est caractéristique de la nature de la cible elle-même : en observant les modifications du faisceau B, on arrive à caractériser la cible, sa position, sa vitesse et ses propriétés physiques.

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Ce radar a été développé par le Intelligent Perception Technology Laboratory du CETC (China Electronics Technology Corporation). Selon l’agence de presse chinoise, le système aurait réussi à détecter une cible à une distance de 100km. Ce n’est effectivement qu’une preuve de concept, et l’utilisation militaire d’une telle technologie nécessite évidemment des portées bien plus importantes. Il y a d’ailleurs là une difficulté : ce que l’on appelle la décohérence. Car plus les particules intriquées passent de temps dans le monde réel, plus elles ont tendance à perdre leurs propriétés quantiques. Lockheed Martin avait d’ailleurs tenté à plusieurs reprises de réaliser un tel radar, avant de se heurter au principe de décohérence.

Les allégations chinoises sont difficilement vérifiables, mais il est néanmoins vrai que la maîtrise d’une telle technologie constituerait une rupture capacitaire et stratégique. Une véritable réflexion sur l’impact de telles innovations (informatique et technologies quantiques, convergence NBIC, …) et sur leur financement, pour éviter à notre pays et à notre continent toute surprise stratégique majeure me semble aujourd’hui indispensable. Mais ce n’est que mon avis.

 

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DF-ZF pour les chinois, WU-14 pour le Pentagone américain : ce sont les petits noms du nouveau planeur hypersonique chinois, capable de voyager entre Mach-5 et Mach-10. Pour être précis, il s’agit d’une charge militaire hypersonique, lancée à partir d’un missile balistique, ce que l’on appelle en anglais « high-speed maneuvering warhead » ou « hypersonic glider », et capable de percer tout système d’interception.

Pour être tout à fait concret, cela représente des vitesses de l’ordre de 10 000 km/h, même si la notion de véhicule hypersonique doit être modulée et précisée en tenant compte de l’altitude de l’engin (dans la haute atmosphère). Mais l’idée est d’être en position de frapper n’importe quelle cible sur la surface de la Terre en moins d’une heure. Ou de neutraliser un satellite en orbite basse.

Le missile propulsant le système DF-ZF a été tiré la semaine dernière à partir de la base de lancement de Wuzhai, en Chine centrale. Officiellement, il s’agit d’un tir d’essai « pour une mission scientifique » (!), qui fait d’ailleurs suite à un tir russe (le 22 avril dernier) d’essai d’un véhicule hypersonique analogue, à la frontière du Kazakhstan.

Le film ci-dessous illustre bien le concept.

Cette charge hypersonique est compatible avec plusieurs types de missiles balistiques chinois, comme le DF21 (moyenne portée) ou DF31 (ICBM ou missile balistique intercontinental). Le principe est de permettre au missile de lâcher le véhicule dans la stratosphère. Celui-ci retombe alors dans l’atmosphère, et voyage à haute vitesse. Bien que générant une trainée importante, cette solution permet de « planer » plus longtemps que si le véhicule était relâché dans l’espace, tout en minimisant le risque d’interception. En l’espèce, neutraliser un tel engin nécessiterait une arme à énergie dirigée (laser ou « railgun »). Bien que la trajectoire soit prévisible au début (car balistique), c’est donc bien la vitesse qui permet de percer les défenses ennemies. De plus, la trajectoire du DF-ZF est dite « up and down » : le véhicule est lâché, entre dans l’atmosphère, puis se rétablit et remonte avant de contrôler son altitude et sa vitesse, et de planer vers sa cible. Cette trajectoire semble erratique, et est très difficile à anticiper pour un système de défense.

La DARPA cherche également à développer un tel programme, et l’US Air Force anticipe une mise en service vers 2020 (notamment sur la base du X51 Waverider, ci-dessous).

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Comme le DF-ZF, le principe est également de « surfer » sur l’onde de choc créée par le véhicule lui-même (et créant une portance dite de compression). Cependant, à la différence du système chinois, le X51 repose sur une propulsion de type statoréacteur, sans aucune pièce mobile, mais qui est lancé à partir d’un bombardier B52. Le tableau ci-après présente les différents concepts.

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Les russes ne sont pas en reste, avec notamment leur missile Zircon (ci-dessous) à base de combustible liquide, et capable de voler à 6000 km/h et tiré à partir d’un sous-marin de cinquième génération (classe Husky).

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Il s’agit donc bien d’une course à l’hypervélocité. Au-delà de se doter de capacités de frappe nucléaire hypervéloce (comme le suggèrent de nombreux article un peu trop racoleurs sur Internet), la Chine cherche surtout à pouvoir montrer (et prouver) ses capacités à percer une défense antimissile régionale, comme le pensent les chercheurs de la Potomac Foundation.

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La carte ci-dessus montre bien les enjeux dans la maîtrise de la région. Une arme hypersonique pourrait jouer un rôle soit dissuasif, soit offensif dans des zones comme Taiwan, ou la mer de Chine méridionale. A suivre, donc.

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Si vous êtes un lecteur assidu (ce que j’espère :-)) de ce blog, vous constatez que j’y parle souvent de la DARPA, l’agence Américaine des projets de défense avancés (Defence Advanced Research Projects Agency). Dotée d’un petit budget de 3 milliards de dollars (autant que le programme français de dissuasion nucléaire !), cette agence a pour objectif de prévenir toute surprise stratégique. Je vous rappelle d’ailleurs l’excellente conférence d’une ex directrice de la DARPA, qui explique fort bien la philosophie de l’agence.

Je vous conseille aussi, par ailleurs, cet excellent livre de Michael Belfiore, sur le même sujet.

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Aujourd’hui, après le Japon et avant la Corée du Sud, la Chine souhaite crée sa propre version de la DARPA. L’initiative rentre dans la logique du président Chinois Xi Jinping, qui a lancé un vaste programme de réorganisation de l’armée chinoise. Rappelons que le budget de la défense Chinois est d’environ 150 milliards de dollars (en augmentation de 7 à 8% d’après les prévisions). Nul ne sait aujourd’hui de combien sera dotée la nouvelle agence. Celle-ci sera gérée par un comité spécial (dont le nom peut être transcrit par « junweikejiwei »), dirigé par le physicien et académicien des sciences Liu Guozhi, un spécialiste du domaine des micro-ondes.

Les thématiques qui pourraient être abordées par cette nouvelle agence sont sans doute connexes aux projets qui ont déjà suscité l’intérêt des hackers officiels chinois (c’est un secret de Polichinelle), comme le programme F35, l’arme Laser du USS Ponce, ou le drone Global Hawk (autant de programmes dont on sait que la sécurité – aux dire du Pentagone – a été compromise).

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Reste encore à savoir comment cette agence (dont la date d’entrée en service n’a pas été divulguée) pourra fonctionner. Car la DARPA américaine lance bon nombre d’initiatives de crowdsourcing, ou de collaboration ouverte par Internet, comme par exemple le forum Wait, What? A Future Technology Forum ou encore l’appel à idées pour le futur engin blindé de combat amphibie (ci-dessous, le design de l’équipe victorieuse, qui a au passage empoché 1 million de dollars).

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Un mode de fonctionnement aux antipodes des habitudes du gouvernement chinois. A moins qu’une nouvelle révolution culturelle ne soit en marche…

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La Chine vient de mettre en ligne une vidéo montrant pour la première fois le drone MALE (medium altitude long endurance)  Wing Loong en train de tester son armement (en l’occurrence un missile air-sol). Ce drone, dont l’apparence ne peut manquer de faire penser à un drone Predator, a été présenté récemment au salon du Bourget. Il a une longueur de 9,34 mètres pour une envergure de 14 mètres, et pèse un peu plus d’une tonne.

Construit par AVIC (Aviation Industry Corporation of China), l’engin descend du “Pterodactyle”, un UCAV (unmanned combat air vehicle) présenté à la fois au Bourget et au salon de Zhuhai en 2012. Il pourrait emporter une charge utile plus importante que celle du Pterodactyle, qui était de 200 kg (seulement). 4 armements ont été exposés : le missile air-sol BA-7, la bombe guidée laser YZ-212, la bombe antipersonnel YZ-102A et une bombe guidée miniaturisée de 50 : la LS-6.

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Il est muni d’un moteur à pistons de 101ch et une hélice tripales, et possède un plafond opérationnel de 5300 m, un rayon d’action de 4000 km et une vitesse maximale de 280 km/h (20h d’autonomie). La station de guidage est présentée ci-dessous.

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Le drone possède plusieurs variantes dont le Sky Saker / Rui Ying destiné à l’export et embarquant un radar SAR et un pod optronique, le WJ-1 pour l’attaque au sol ou encore le GJ-1 également destiné à l’attaque au sol, et capable d’effectuer une désignation automatique de cibles.

La video montre le tir de test du Wing Loong, ainsi que la séquence de chargement.

L’ ambition de la Chine n’est pas uniquement technologique. Il s’agit en l’occurrence de fournir une alternative à l’export, pour des pays incapables d’acheter des drones américains ou israéliens en raison de contraintes législatives ou d’embargos. En fait, la Chine n’ayant pas pris part aux accords MTCR (Missile Technology Control Regime) et à l’arrangement de Wassenaar sur le contrôle des exportations d’armes conventionnelles et de biens et technologies à double usage, elle prétend jouer le rôle de challenger à l’export, sans être liée à de telles contraintes.

Dans ce domaine, la Chine, qui fait fabriquer ces engins par des consortiums académiques, ce qui a l’effet immédiat de baisser les coûts de production et le prix de vente, serait un joueur crédible et disruptif. A titre d’exemple, le drone MALE BZK-005, livré à plus de 1500 exemplaires à l’armée chinoise, a été développé par la Beijing University of Aeronautics and Astronautics et le groupe Harbin Aircraft Industry Co., Ltd – la comparaison avec le drone américain MQ1 Predator est présentée ci-dessous.

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Même s’il est aujourd’hui difficile d’évaluer le degré réel de sophistication des drones chinois, la Chine est sans nul doute en train de devenir un acteur réel capable de jouer un rôle de premier plan dans la prolifération de drones aériens militaires.

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Dans la course au « soldat augmenté », l’armée de la république populaire de Chine n’est pas en reste : depuis peu, elle développe et perfectionne ses propres exosquelettes militaires. Au-delà de leur utilisation dans un contexte logistique et de manutention, l’ambition de l’armée chinoise est bien de permettre aux soldats d’infanterie d’évoluer plus facilement dans les terrains difficiles, notamment montagneux.

L’institut 202 (groupement industriel) avait présenté son premier modèle d’exosquelette au meeting aérien de Zhuhai, en 2014, comme l’illustre la vidéo ci-dessous. Ce dernier avait un coefficient de 80% (un poids porté de 100kg ne pèse que 20kg pour le porteur de l’exosquelette).

En juin, l’institut a dévoilé une version upgradée de ce système, capable notamment de permettre des mouvements complexes requérant une grande flexibilité (ramper dans la boue, sous des barbelés, par exemple), tout en conservant l’avantage de l’exosquelette en termes de transport de charges lourdes.

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On constate à ce sujet un système d’aide en haut du costume, pour permettre l’emport d’objets lourds (une espèce de « grue portable », en quelque sorte). Les caractéristiques de l’exosquelette upgradé sont les suivantes : emport de plus de 50 kg, capacité de marcher 20km à une vitesse moyenne de 4,5 km/h. Des caractéristiques proches du système HULC développé par Lockheed Martin (ci-dessous).

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Mais ce qui interpelle également, ce sont les vidéos présentant le concept en images de synthèse. On y voit clairement que l’exosquelette est appelé à servir non seulement en soutien, mais en première ligne, avec des soldats portant de lourdes charges, et un armement également pesant.

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Une solution intéressante pour l’allègement du combattant, problème de premier plan aujourd’hui dans les armées, et compte tenu à la fois de la numérisation du soldat, et de la difficulté des missions. Toutefois, la problématique de la charge et de la puissance électrique demeure, même  si ces différents systèmes sont capables, même en cas de faible charge batterie, de continuer à soutenir des charges sans « laisser tomber » le combattant.

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Mais au-delà du transport de charges, l’intérêt d’un exosquelette est de permettre l’augmentation des capacités de mobilité du soldat : sauter plus haut, courir plus vite, et avec un armement complet. En ce sens, il sera intéressant de suivre les évolutions du système chinois.