Archives de la catégorie ‘Aéronautique’

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Bonjour à tous. Comme j’ai eu l’occasion de le signaler dans un précédent post , je ne puis plus continuer pour l’instant ce blog de la même manière qu’auparavant. Pour autant, l’Agence de l’Innovation ainsi que les autres acteurs du ministère (DGA, EMA, SGA…) sont actifs, et je vais donc utiliser ce blog pour relayer les différentes actions ou initiatives que nous menons, et vous tenir au courant des réflexions de l’Agence.

Je commence donc aujourd’hui, en relayant deux appels à projets de l’Agence :

  • Un appel à partenariats à destination des acteurs civils de l’écosystème d’innovation et de soutien à l’entreprenariat (fonds d’investissement, incubateurs, accélérateurs etc.). Il est visible ici
  • Un appel à projets avec le soutien de la direction de la maintenance aéronautique (DMAé) et de l’Armée de l’Air, portant sur l’amélioration des techniques de contrôles non destructifs des aéronefs dans le cadre de la maintenance aéronautique. Voici la page de description.

J’en profite pour vous rappeler la page Internet (en attendant) officielle de l’Agence d’innovation de défense: https://www.defense.gouv.fr/aid. A bientôt sur la fréquence.

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Bon, je sais ce que vous allez me dire : il a dit qu’il continuait son blog, et rien ne se passe… Effectivement, je plaide coupable. Depuis que j’ai rejoint le ministère, et l’Agence de l’Innovation de Défense, je suis un peu  à la traîne question blog. Je plaide coupable donc, mais cela ne peut que s’arranger.

Alors pour reprendre les bonnes habitudes, un petit article sur l’irruption de la technologie civile dans le monde opérationnel. Un exemple qui nous vient des Etats-Unis, mais ne vous inquiétez pas, à la fin de cet article (oui, je fais du teasing), vous verrez qu’en France, nous ne sommes pas en reste sur l’innovation de défense.

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Partons pour les USA, donc, et en particulier pour Quantico, lieu mythique des US Marines, qui comme chaque année, accueille l’exposition « Modern Day Marine ». Pendant trois jours, cette exposition présente les dernières tendances et derniers matériels au service du « marine de demain ».

En vedette cette année, le DS EZ Raider, un scooter électrique distribué par Mistral Inc. La bestiole ne pèse que 70 kilos, mais possède une capacité d’emport de plus de 200 kg. Il s’agit d’un scooter durci, aérotransportable, tout terrain et muni de 4 roues. Sa vitesse de pointe est de 70 km/h, ce qui est loin d’être ridicule. Un hélicoptère blackhawk peut transporter trois de ces bestioles.

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Donc du tout-électrique, capable d’assurer une fonction tactique élémentaire (pas de fonction militaire spécifique, mais un engin capable d’être projeté sur un théâtre, et immédiatement utilisable par n’importe quel soldat sans nécessité de formation spéciale). Reste à voir l’efficacité de l’engin et en particulier de ses batteries en environnement exigeant, désertique ou au contraire glacial. Une problématique qui n’est généralement pas la priorité des constructeurs civils.

A Modern Day Marine, on trouve aussi de la réalité augmentée – en l’occurrence les lunettes Hololens de Microsoft, utilisées lors d’une expérimentation par le Marine Corps Warfighting Lab. En l’occurrence, il s’agit d’entraîner les opérateurs de maintenance à s’entraîner à travailler sur un modèle virtuel 3D du 155mm Howitzer.

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Bon, franchement, je suis toujours un peu dubitatif sur la fonction « entraînement » de la réalité augmentée. Autant son utilisation pour de la maintenance à distance me semble apporter un réel avantage permettant à un opérateur non entraîné de faire appel à un expert, autant pour un entraînement, je suis assez réservé.

Le danger est en effet de faire de l’apprentissage négatif, c’est-à-dire d’apprendre de mauvais gestes ou de mauvais réflexes, dans la mesure où – en particulier – les retours haptiques ne sont pas reproduits. Le risque est encore plus grand en réalité virtuelle.

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Au show Modern Day Marine, on trouvait aussi un laser anti-drone développé par Boeing (et dont nous avions déjà parlé dans ce blog), le drone Bell V247 Vigilant (ci-dessus) que la société a l’intention de vendre au US Marine Corps ou encore le concept de 70mm FLETCHER capable de lancer des roquettes guidées, et destiné au combat asymétrique (ci-dessous).

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Une exposition intéressante, même si, d’après certains observateurs, il était difficile d’identifier un fil conducteur – une petite impression de « concours Lépine » du Marine, donc. Un écueil que nous nous efforcerons d’éviter (le teasing dont je parlais) lors du Forum Innovation Défense du ministère des armées.

Je vous donne rendez-vous du 22 au 24 novembre à Paris, pour une exposition ouverte au grand public, des animations inédites, des keynotes et ateliers passionnants et des démonstrations interactives, au cœur de Paris. De quoi me faire pardonner mon silence de ce dernier mois.

 

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Comme promis, de retour de vacances (un peu agitées mais aussi très agréables compte tenu de mon actualité personnelle), je reprends le fil de ce blog. J’en profite pour vous assurer que même si je prends de nouvelles fonctions, je continuerai à animer VMF214, ne serait-ce que parce que cela me force à rester ouvert et curieux. J’en profite aussi pour vous dire combien je suis heureux et impatient de débuter ma nouvelle mission, dans ce domaine qui me passionne, et pour mon pays.

En attendant, voici un drôle d’oiseau. Baptisé Cormorant, il s’agit en réalité d’un robot, hybride entre un taxi volant du film « le cinquième élément » et d’un vaisseau de Blade Runner. Initialement baptisé AirMule (on voit pourquoi ils ont décidé de changer), le Cormorant est de conception israélienne, et développé par la société Tactical Robotics, une filiale de Urban Aeronautics Ltd. Située en Israel, à Yavne, elle est dirigée par le Dr Rafi Yoeli.

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Le Cormorant est un UAV (Unmanned Aerial Vehicle) militaire, destiné à porter des charges importantes de manière autonome. Ses capacités d’emport ? 764 Kg (soit 1681 lb), à une vitesse de 100 nœuds (185 km/h), et un rayon d’action qui dépend de sa charge utile, hors fuel (plusieurs centaines de km à vide, environ 50km avec une charge d’une demi-tonne). Il est propulsé par deux turbines soufflantes incluses dans la carlingue (connectés au moteur Turbomeca Arriel 2N) qui lui confèrent des capacités VTOL (Vertical Take-Off and Landing) avec un facteur de taille très compact en comparaison d’un hélicoptère classique (3,5m de largeur, 2m30 de hauteur, 6m20 de longueur), ainsi que par deux rotors horizontaux.

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En pratique, cela revient à emporter des charges lourdes (eau, nourritures, armement), ou plusieurs blessés dans le cadre d’une évacuation sanitaire, par exemple. Les concepteurs ont d’ailleurs prévu que le blessé, une fois embarqué, puisse être connecté via une liaison satellitaire à un centre de télédiagnostic ayant notamment accès à l’évolution de ses constantes vitales.

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De plus, le Cormorant est construit en fibres de carbone, ce qui permet de lui conférer une certaine discrétion radar (la signature infrarouge étant elle aussi réduite par l’emploi de systèmes de refroidissement par air, ce qui donne au Cormorant sa forme un peu étrange). Son système de stabilisation lui permet de résister à des vents de 40 nœuds, même si la vidéo du dernier essai du Cormorant montre que le vol ne doit pas être de tout repos, surtout pour un blessé – voir ci-dessous.

Pour assurer une certaine stabilité, un système original a été développé par Tactical Robotics. Il s’agit de micro-rotors en cascade situés à proximité des turbines soufflantes. Le souci ? Sans un système de stabilisation dynamique, le problème – connu – de ce type de turbine est une sensibilité trop importante notamment aux rafales et vents de travers. Le système imaginé par les concepteurs du Cormorant consiste à disposer des micro-rotors à proximité des turbines (aspiration et sortie), contrôlés électroniquement de manière à générer des forces contraires permettant d’équilibrer le véhicule.

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En ce qui concerne son pilotage, un plan de vol est rentré dans le système de préparation et de conduite de mission (deux valises tactiques avec leurs écrans) – une fois ce plan validé, l’opérateur peut laisser la bête en pilotage autonome, même s’il peut reprendre la main en cas de besoin. Bon, si vraiment il y a un gros souci, le système dispose tout de même d’un parachute avec un système de déploiement par fusée.

Ce type de véhicule semble donc appelé à se généraliser, qu’il s’agisse du côté autonome (drones en tous genres) ou du système de propulsion de type hoverboard. A ce sujet, une pépite française, la société Zapata, a développé un système impressionnant – voir ce post – qui pourrait sans doute être utilisé pour les besoins des Forces Spéciales. Un domaine à suivre, qui montre qu’au-delà des « robots tueurs » et autres fantasmes, la robotique opérationnelle est bel et bien un domaine en expansion, au service des opérationnels et au plus près du terrain.

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Bien que le projet soit engagé depuis 2012, c’est ce mois-ci, lors de la conférence FIRES de Fort Sill (USA), qui permet chaque année aux industriels de dévoiler leurs dernières innovations en termes de technologie de défense (ci-dessous), que Lockheed Martin a fait le « buzz ». La firme américaine a en effet, et pour la première fois, dévoilé des détails et caractéristiques techniques sur son missile miniature « Hit-To-Kill » (MHTK).

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Il s’agit d’un nouveau type de missile miniature, permettant, sur le même principe que le système « Iron Dome » israélien, de constituer une bulle de protection autour d’installations sensibles, ou de troupes déployées.

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La bestiole est très, très compacte ; en gros, la taille d’un parapluie : 71cm de long dans sa dernière version (contre 68cm initialement), un diamètre de 4cm, et un poids d’environ 2,2 kg. Cela, en soi, c’est une innovation. Car le missile MHTK embarque un radar miniaturisé à antenne active, un système de propulsion et son carburant, le système de contrôle, et bien évidemment une charge utile (en l’espèce, de la même manière qu’un obus flèche, c’est l’énergie cinétique qui provoque l’effet militaire, sans besoin d’une charge explosive). Le système de tracking est une antenne AESA (active electronically-scanned array) qui procure un champ de balayage de 45° en élévation, avec un angle de 90°. Pour mémoire, un radar AESA remplace l’antenne mécanique mobile d’un radar classique par un ensemble fixe composé de plusieurs modules émetteur/récepteur. Chacun de ces modules est commandé individuellement, ce qui permet d’orienter le faisceau dans la direction souhaitée.

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L’emploi privilégié du MHTK est la protection d’installation contre des attaques de type roquettes, missiles ou drones. Différents radars couvrant la zone ont fonction de détecter la menace. Une fois celle-ci identifiée, le MHTK est lancé, et va se diriger vers les coordonnées signalées par le radar, avant d’engager une phase de recherche autonome de sa cible en analysant notamment sa vitesse d’approche. L’interception est directe (« hit to kill ») et permet d’éviter les dégâts collatéraux que l’on peut redouter si l’on emploie une charge explosive au lieu d’une charge cinétique.

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L’objectif est de pouvoir lancer le MHTK à partir de plateformes mobiles (camions lanceurs) ou même d’employer des systèmes de lancement verticaux, permettant d’embarquer une trentaine de missiles, qui ensuite trouveront d’eux-mêmes leur cible (plusieurs versions du MHTK existent, actives ou semi-actives, mais elles possèdent toute la même configuration). Lockheed Martin cherche ainsi à imposer le choix du MHTK comme le système retenu dans le cadre du programme Indirect Fire Protection Capability de l’US Army.

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Mais comment Lockheed Martin a-t-il réussi à miniaturiser un tel système (gage notamment de sa manœuvrabilité une fois dans les airs, sachant qu’il doit intercepter des cibles elles-mêmes très manœuvrantes) ? La réponse : en s’inspirant de technologies civiles !

Son système de tracking utilise ainsi des composants issus de l’imagerie médicale (en particulier en convertissant les radiofréquences en signaux lumineux – pour le coup, c’est le niveau maximal d’information fourni par Lockheed Martin !). Ce faisant, le système gagne en compacité. Les ingénieurs se sont également inspirés de l’industrie des smartphones afin d’en dériver des modules et en particulier d’en exploiter une caractéristique très intéressante : dans un smartphone, l’électronique est conçue de telle façon que les composants n’interfèrent pas entre eux alors qu’ils cohabitent dans un facteur de forme très compact. Une caractéristique évidemment très utile au domaine militaire.

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Ce « baby missile » comme la presse le surnomme déjà est donc l’illustration parfaite des fertilisations croisées entre le monde civil, grand public, et l’innovation technologique de défense. De plus, l’utilisation de technologies dites CE pour « Consumer Electronics » permet de garantir une certaine robustesse. Un smartphone doit pouvoir tomber, encaisser des chocs, des variations de température, sans pour autant cesser de fonctionner. Finalement, le monde civil est parfois plus exigeant en termes de robustesse que le monde militaire.

Le missile MHTK – s’il remporte la compétition – devrait être mis en service d’ici 2022.

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Nous avions déjà parlé des armes hypersoniques ou hypervéloces, dont, je le rappelle, l’objectif est de pouvoir frapper n’importe quel point du globe en moins de 1h. Pour rappel, on désigne par hypersonique une charge militaire pouvant être propulsée à une vitesse comprise entre Mach 5 et Mach 10 – une vitesse de l’ordre de 10 000 km/h. Nos amis chinois avaient récemment testé avec succès leur arme DF-ZF, une charge militaire propulsée par un missile balistique jusqu’à la stratosphère. Le DF-ZF est lâché, entre dans l’atmosphère, puis se rétablit et remonte avant de contrôler son altitude et sa vitesse, et de planer vers sa cible. Cette trajectoire semble erratique, et est très difficile à anticiper pour un système de défense, principalement en raison de sa vitesse.

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Mais une telle arme est complexe à mettre au point, notamment parce que ses composants (charge militaire mais aussi système de guidage) sont soumis à de très fortes contraintes (accélération, frottements, température). Il est donc nécessaire de pouvoir disposer de moyens d’essais conséquents.

Pour ce faire, la Chine vient d’annoncer qu’elle était en train de bâtir la soufflerie la plus puissante du monde, permettant de simuler des vitesses de l’ordre de 12km/s, concurrençant ainsi directement la soufflerie LENS-X située au Nevada, jusqu’alors le tunnel hypersonique le plus puissant du monde (Mach 30), et plus puissante que la soufflerie hypersonique chinoise actuelle, appelée JF 12 (et rebaptisée HyperDragon) – le reportage ci-dessous permet d’en découvrir les images.

Il ne s’agit pas d’un problème simple : construire une soufflerie hypersonique nécessite de surmonter différents défis : la capacité de reproduire sans danger des situations de surchauffe, sans détruire l’installation elle-même, la reproduction de conditions extrêmes de températures et de pression pendant une durée longue, avec un système d’instrumentation et de mesure lui-même hyper-rapide, et sans oublier les contraintes liées à l’alimentation en électricité d’une telle installation.

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La génération d’un flux d’air aussi puissant ne peut reposer sur une hélice, aussi grosse soit-elle. Il a fallu trouver un autre moyen, en l’occurrence, une détonation. Dans le cas de la soufflerie hypersonique chinoise, le principe repose sur une série de détonations contrôlées. Des tubes d’oxygène, d’hydrogène et d’azote permettront de faire détoner un mélange de gaz, créant ainsi une série d’explosions, donc d’ondes de choc. Ces ondes seront canalisées par un tunnel métallique, jusqu’à la chambre de test ; selon l’un des ingénieurs responsables du projet, elles généreront l’équivalent de 1 GW de puissance en 0,5 s, soit la moitié d’une centrale nucléaire classique. Elles permettront de créer une température de 7700 degrés au sein de la chambre de test (oui, oui, plus chaud que la surface du soleil) afin de pouvoir tester les revêtements et systèmes de dissipation de l’énergie thermique du véhicule hypersonique, lors de sa rentrée dans l’atmosphère.

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On rappelle que la vitesse EV (escape velocity ou vitesse de libération en français) correspondant à la vitesse nécessaire pour échapper à l’attraction terrestre, est de 11 km/s. Même si la soufflerie chinoise ne bat que de 2km/s l’installation LENS-X, il s’agit de pouvoir tester des vecteurs dans toutes les phases du vol hypersonique (ce que les américains ne peuvent aujourd’hui faire).

La nouvelle installation permettra de tester des modèles assez volumineux (on parle d’une envergure de 3m). Elle devrait être mise en service d’ici 2020, ce qui montre l’importance que la Chine accorde à son programme hypersonique, et à la course aux armements dans laquelle elle prend aujourd’hui la tête vis-à-vis des USA et de la Russie.

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On n’a pas fait plus simple ni plus efficace que le fusil d’assault AK-47, inventé par un certain Mikhail Kalashnikov, décédé en 2013. Rappelons au passage que le 47 correspond à la date de mise sur le marché du fusil « Avtomat Kalachnikova 1947 ». Une arme simple, efficace, robuste et d’un calibre suffisant pour défier même nos forces les plus modernes.

Cette simplicité et cette rusticité, Kalashnikov Concern, société filiale du géant russe Rostec, en a fait sa marque de fabrique. Et elle vient encore une fois de le prouver, avec un nouveau concept d’hoverbike, véhicule volant destiné à équiper les soldats sur le champ de bataille futur.

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Le système, décrit comme « une voiture volante » par la société, est en fait un châssis de tubulures mécaniques équipé de 8 rotors contrarotatifs pilotés à l’aide d’un calculateur. Pas de descriptif officiel, mais l’on devine que la propulsion est électrique, avec des batteries situées sous l’engin. Ce dernier est minimaliste, sans coque de protection, et semble pouvoir être piloté à l’aide de deux joysticks.

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Pour l’instant pas d’armement ni de protection pour le pilote malgré la présentation d’un concept par Kalashnikov (bizarrement non présenté en fonctionnement).

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La vidéo (ci-dessous) mise en ligne par Kalashnikov Concern, montre l’engin évoluant dans l’air de façon assez convaincante.

Toutefois, une telle machine n’aura sans doute pas aujourd’hui une autonomie suffisante : avec une propulsion électrique, et les batteries visibles, elle n’est probablement pas en mesure de tenir en l’air plus de 30 minutes.

Dans la même veine, un autre engin russe a récemment été présenté au public : le Scorpion-3, autre hoverbike piloté.

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Par rapport au kalashnikov, le Scorpion-3 semble quant à lui décidément dangereux. Pas pour les autres (quoique) mais surtout pour son pilote, assis comme sur une moto, avec les jambes au niveau des rotors, position sans doute pratique pour réaliser une double amputation en cas de fausse manœuvre. On n’imagine même pas ce qui pourrait advenir en cas de crash.

Le véhicule (également appelé Hoversurf) est visible sur la vidéo ci-après.

Même si ces deux engins semblent considérablement perfectibles (la sécurité pour l’un, l’autonomie pour l’autre, l’emport de charges utiles pour les deux ainsi que la protection), ils témoignent de la tendance du marché à l’apparition de véhicules hybrides entre un drone et un véhicule piloté, avec un système de contrôle gyrostabilisé permettant un pilotage aisé. Une tendance sans doute pérenne, la simplicité du système Kalashnikov présageant bien d’une certaine démocratisation du concept.

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Dans le contexte de l’augmentation des capacités du soldat, on parle beaucoup de l’utilisation de substances pharmacologiques permettant de stimuler l’endurance ou la concentration. Cela pose évidemment de nombreux problèmes éthiques (une préoccupation que nos pays partagent, au passage, ces barrières morales sont sans doute inexistantes pour nos ennemis, voire certains de nos alliés). Mais d’autres voies sont à l’étude, et notamment une technique appelée stimulation électrique transcrânienne directe.

Cette technique a été étudiée depuis de nombreuses années, dans le cadre de la recherche de solutions à la surcharge cognitive ou surcharge informationnelle. Pour faire simple, durant des opérations militaires complexes ou de haute intensité, les opérateurs sont supposés effectuer plusieurs tâches simultanées dans un contexte de stress, et en traitant des masses importantes d’information. Arrive un point où le cerveau, en surcharge, « décroche », et n’est plus capable de traiter les nouvelles informations qui lui parviennent.

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Pour pallier ce léger inconvénient (!) plusieurs solutions ont été expérimentées, comme – on le disait plus haut – l’administration de substances comme la ritaline, avec des effets secondaires massifs (en gros, cette drogue qui est utilisée pour traiter les symptômes d’hyperactivité et de déficit de l’attention, provoque une dépendance analogue à la cocaïne). La recherche s’est donc orientée vers d’autres voies, en particulier la stimulation électrique du cortex préfrontal, appelée stimulation électrique transcrânienne (en anglais, TCDS pour transcranial direct current stimulation). Les premières expérimentations ont été réalisées en 2016 par les chercheurs de l’US Air Force et de Wright State University (WSU), et ont été publiées dans cet article.

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L’idée est de stimuler à l’aide d’électrodes placées sur le crâne la région correspondant au cortex préfrontal gauche, une zone siège de l’attention, de la planification, de la mémoire de travail et du raisonnement. Un courant de 2mA est appliqué pendant une durée allant de 10 à 35 minutes. Lors des premières expérimentations (utilisant un test attentionnel appelé Multi-Attribute Task Battery (MATB) développé par la NASA – voir image ci-dessous), un groupe ayant reçu la TCDS a très nettement surpassé le groupe témoin.

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Visiblement, le procédé permet au cerveau de stocker plus efficacement les données en mémoire de travail, permettant au sujet de se concentrer sur les nouvelles informations au lieu de constamment passer en revue l’ensemble des signaux de l’environnement. Une étude publiée en 2013 avait montré des effets analogues sur la concentration et la performance d’analystes chargés d’étudier des images de type SAR (Synthetic Aperture Radar) – voir cette référence.

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Si dans cette première étude les chercheurs ont utilisé un système de stimulation baptisé MagStim NeuroConn DC Stimulator – ci-dessus – des expérimentations plus opérationnelles ont également été engagées, notamment auprès des forces spéciales (team six) ou des pilotes de drone. Car ces derniers sont soumis à des tâches longues, fatigantes, stressantes, à un point tel que l’armée américaine a décidé de diviser par deux le nombre de missions planifiées par an, afin d’éviter un « burn-out » de ses pilotes.  Dans ce cas précis, certaines études montrent que la concentration des pilotes peut être maintenue pendant 20h en appliquant la TCDS, alors qu’un groupe test montre déjà des signes de baisse de l’attention au bout de 20 minutes.

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Ces nouvelles expérimentations utilisent un autre type de stimulateur construit par la société Halo Neuroscience – ci-dessus – un casque muni de piques de silicone, enduites d’une solution saline, et capable de stimuler (sans doute moins précisément que dans l’étude de la WSU) le cortex préfrontal. L’armée américaine espère que ce nouveau facteur de forme permettra – si l’expérimentation est concluante – d’utiliser la TCDS « in situ », éventuellement sur un pilote de chasse en situation de pilotage. Pour l’instant, il convient encore d’être prudent, et de valider les effets à long terme – positifs ou négatifs – d’un tel procédé.

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C’est évidemment paradoxal compte tenu de l’histoire militaire des Etats-Unis, notamment dans la Guerre du Pacifique, mais la semaine dernière, lors du salon d’armement Army USA (AUSA), la société américaine Mistral, représentant de la société israélienne Uvision aux Etats-Unis, a présenté un drone kamikaze opérationnel à destination des forces spéciales américaines.

Le principe de ce drone ? Un hybride entre un drone opérationnel et une munition « rodeuse » (loitering en anglais), baptisé Hero. Lancé par un système pneumatique (en gros, un canon à air comprimé), le drone Hero possède tous les attributs d’un drone classique : des commandes de vol, un système de téléopération, un système de caméra… mais aussi une charge militaire explosive.

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Le principe est simple ; le système peut être emporté sur le terrain (au moins dans sa variante appelée Hero 30), pesant moins de 15 kg avec son système de lancement. Une fois en vol, le Hero 30 peut être téléopéré par un opérateur, et possède une autonomie de 30mn.

Mais le drone ne se contente pas d’observer : une fois une cible identifiée, il se transforme en missile afin d’effectuer la neutralisation de son objectif (lire caramélisation, c’est juste un terme un peu plus… sibyllin). Plusieurs versions existent : le Hero 30 avec une charge antipersonnel efficace également sur les véhicules très légèrement blindés, le Hero 40 avec une charge militaire plus importante, et destiné à être lancé à partir d’un véhicule, et le plus imposant Hero 120.

Les drones Hero peuvent en effet être lancés à partir d’un véhicule blindé, ce qui permet d’équiper des unités de reconnaissance d’une plate-forme permettant de lancer une dizaine de drones, quantité estimée suffisante pour neutraliser les unités ennemies de premier rideau. Le Hero 120 quant à lui possède une autonomie d’1 h, une portée de 40km, et une charge de 3.5kg d’explosif suffisante pour faire de l’antichar.

A la différence d’un missile, le Hero possède toutes les fonctions d’un drone : vision jour/nuit, utilisation en environnement non accessible au GPS, autonomie de navigation… Par rapport à une munition classique, l’idée est aussi de pouvoir faire du « handover », soit de la transmission de contrôle : le drone est lancé par un poste opérationnel avancé, et la section de reconnaissance sur le terrain en prend le contrôle pour les phases terminales de la mission.

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Il s’agit donc d’une munition intelligente dite « rôdeuse » car pouvant être déployée dans une zone sans avoir de cible préétablie. En revanche, oubliez le fantasme du robot tueur ou SALA (système d’armes létal autonome) capable d’identifier sa cible et de décider unilatéralement de la traiter. L’autorisation de l’opérateur est requise pour procéder à l’autorisation d’emploi de la charge militaire ; et de toutes façons, je ne connais pas beaucoup d’unités qui se risqueraient sur un théâtre survolé par un robot qui déciderait de lui-même de faire exploser sa charge (il y a des volontaires ??).

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Pour l’heure, l’US Army – en particulier l’US SOCOM, commandement des forces spéciales américaines – procède à des tests opérationnels, en ayant annoncé son vif intérêt pour le système proposé par Uvision. La société annonce d’ailleurs son système Hero 400, nouvelle version du drone kamikaze de 2m de long et 2,4m d’envergure, muni d’une charge creuse en tandem de 10kg.

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Lorsque l’on parle de robotique et d’aéronautique, on pense de prime abord aux drones, aux véhicules robotisés, mais pas aux fonctions de service ou de soutien. C’est pourquoi le programme AR3P mérite un petit éclairage.

AR3P cela signifie Autonomous & Robotic Remote Refueling Point (point de ravitaillement en essence autonome et robotisé). Il s’agit d’un programme développé par l’US Army Aviation and Missile Research, Development and Engineering Center et qui vise à démontrer la pertinence d’utiliser des points de ravitaillement totalement autonomes pour les voilures tournantes, avec deux préoccupations en tête : limiter le temps passé au sol pour les hélicoptères militaires, et éviter de devoir déployer des équipes humaines dans des centres de ravitaillement isolés.

Il est vrai qu’un point de ravitaillement, c’est en soi une cible militaire – dès lors, on conçoit bien l’intérêt d’un centre totalement automatisé, sans présence humaine. Ce faisant, on devient capable de créer des points de ravitaillement avancés (uFARP ou unmanned Forward Area Refueling Points) sur le modèle des bases opérationnelles avancées (ou FOB), c’est-à-dire partout, y compris en territoire hostile.

L’idée est donc de permettre ce que l’on appelle un « Quick Hook-up », un ravitaillement extrêmement rapide, utilisant des bras robotisés capables de s’auto-aligner avec la perche ou l’orifice de ravitaillement, bardés de capteurs et articulés afin de permettre de s’adapter aux différents types d’appareils.

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Le centre de l’US Army vient donc de conduire un test, une démonstration limitée du concept (Limited Initial Capabilities Demonstration) en utilisant des modules robotiques du commerce, à l’exception de la sortie du carburant, qui a fait l’objet d’un prototypage par fabrication additive (impression 3D).

La vidéo ci-après présente le projet AR3P, qui en soi n’est pas limité aux seuls hélicoptères mais envisage également les capacités de ravitaillement automatique en vol pour les drones de combat (la voix assurant le commentaire est également robotisée !)

En fait, le système ressemble à celui développé par TESLA pour ses stations de rechargement automatique (ci-dessous) même si évidemment le concept est – en ce qui concerne AR3P) bien plus élaboré.

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On retrouve néanmoins les mêmes fonctions, et notamment l’utilisation d’un bras autonome articulé, capable de s’auto-aligner avec l’orifice de ravitaillement. Dans un contexte opérationnel, le processus est bien plus complexe car il serait inconcevable soit d’endommager l’appareil, soit de connaître un problème en cours de ravitaillement qui immobilise dangereusement l’hélicoptère et son équipage au sol. C’est pourquoi le programme AR3P sera conduit en plusieurs phases : actuellement en phase 2 (levée de risque), il comprend une phase 3 (test du concept sur un appareil Mosquito) et une phase 4 finale permettant de développer un système opérationnel pour les hélicoptères de combat AH-64 Apache.

Compte tenu de l’excellent niveau technologique de la France, notamment en termes de robotique, il pourrait être intéressant de lancer chez nous quelques études permettant de développer un concept similaire pour nos hélicoptères de combat ou de transport. Voire à d’autres types de véhicules, ou de navires… Une idée en passant.

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Dans la lutte contre le terrorisme, la localisation, détection, et, le cas échéant, interception des communications des téléphones satellites sont des enjeux majeurs. Guère plus imposants que des téléphones classiques, les téléphones satellites utilisent comme leur nom l’indique une liaison satellitaire directe sans devoir passer par des antennes relais. C’est le cas des systèmes les plus connus comme Thuraya ou Inmarsat.

Les téléphones satellites sont utilisés par les officiels, les journalistes, les travailleurs humanitaires, mais aussi par certains terroristes, et par les passeurs de migrants. On se rappelle par exemple des attentats de Bombay en 2008 (photo ci-dessous), attentats coordonnés menés par cinq équipes de deux hommes (mode opératoire similaire aux attentats du 13 novembre 2016 à Paris). On sait maintenant que les terroristes avaient utilisé des téléphones satellites pour coordonner leurs actions et leurs attaques.

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Suivre un personnel équipé d’un téléphone satellite, détecter un groupe terroriste ou identifier et suivre une embarcation de migrants nécessitait jusqu’à maintenant l’utilisation de moyens aériens onéreux. Les industriels comme le leader Rhode & Schwarz ont ainsi développé des moyens SIGINT (SIGnal INTelligence) permettant de détecter et d’intercepter les signaux radio concernés, qu’il s’agisse de SMS, de voix ou de liaisons de données. Ces plates-formes SIGINT sont montées sur des avions ISR (Intelligence, Surveillance, Reconnaissance)  ou des hélicoptères qui survolent la zone surveillée afin d’avoir une bonne couverture radio. Au-delà de la communication elle-même, les résultats sont géolocalisés et reportés sur un système d’information géographique.

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Mais quand les territoires sont étendus comme dans la bande sahélo-saharienne, ou en mer méditerranée (avec la détection des bateaux convoyant illégalement des migrants), le coût d’une telle surveillance aéroportée est prohibitif. De plus, les flottes d’avions SIGINT – souvent la propriété de « contractors » privés comme AirAttack qui proposent des Cessna 550 Citation II  – sont limitées, et extrêmement sollicitées. Il y a donc un intérêt certain à utiliser des systèmes plus petits et plus flexibles, comme les drones. Toutefois, jusqu’à ce jour, les caractéristiques et dimensions des systèmes SIGINT étaient difficilement compatibles avec leur emport sur une plate-forme de type UAV. Une difficulté aujourd’hui surmontée par la société britannique Horizon Technologies.

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Cette société est connue pour son système FlyingFish, développée en partenariat avec le géant américain L3-Communications. Dans sa troisième génération – et sa version aéroportée –  il s’agit d’un système passif de surveillance, permettant de détecter et surveiller simultanément 64 canaux des réseaux Thuraya et IsatPhone Pro (32 canaux surveillés par réseau), avec une portée de surveillance de 400km. Les deux réseaux ne sont pas équivalents : le réseau Isat Phone Pro, en particulier, nécessite un module de décryptage permettant de récupérer la communication, et la position GPS du terminal, ce qui n’est pas le cas du réseau Thuraya. Le système FlyingFish pèse tout de même 16kg, pour des dimensions de 39,2×37,1×24 cm, ce qui le rend difficile à emporter par autre chose qu’un avion ou un hélicoptère.

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Pour pallier cet inconvénient, la société a développé XTender, un module permettant de déporter sur un drone (même un mini-drone) une antenne et un module de calcul relayant les capacités du module FlyingFish. Ce module pèse moins de 5 kg – il est complété par une antenne de moins de 500g, de la taille d’une clé USB, déployable également sur le drone. L’ensemble module/antenne dialogue avec une station FlyingFish à terre.

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L’intérêt de la technologie est également d’être duale : pas de réglementation ITAR ici, seule une licence d’exportation commerciale britannique est requise. Pour le constructeur, le système Xtender peut être utilisé sur des drones de type REAPER ou Spyranger, jusqu’à des minidrones comme les machines ISR d’AeroVironment comme le PUMA (ci-dessous).

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Enfin, la capacité du FlyingFish de pouvoir, de manière passive, surveiller deux réseaux simultanément est susceptible de contrer certains modes d’actions de groupes terroristes, qui pensent échapper à la surveillance en changeant fréquemment de réseau. Plus de 30 systèmes sont déjà déployés aujourd’hui sur des plates-formes aériennes au sein de l’OTAN – un nombre susceptible de croître considérablement grâce à l’emploi de ces mini-drones « ISR ».