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Comme promis, de retour de vacances (un peu agitées mais aussi très agréables compte tenu de mon actualité personnelle), je reprends le fil de ce blog. J’en profite pour vous assurer que même si je prends de nouvelles fonctions, je continuerai à animer VMF214, ne serait-ce que parce que cela me force à rester ouvert et curieux. J’en profite aussi pour vous dire combien je suis heureux et impatient de débuter ma nouvelle mission, dans ce domaine qui me passionne, et pour mon pays.

En attendant, voici un drôle d’oiseau. Baptisé Cormorant, il s’agit en réalité d’un robot, hybride entre un taxi volant du film « le cinquième élément » et d’un vaisseau de Blade Runner. Initialement baptisé AirMule (on voit pourquoi ils ont décidé de changer), le Cormorant est de conception israélienne, et développé par la société Tactical Robotics, une filiale de Urban Aeronautics Ltd. Située en Israel, à Yavne, elle est dirigée par le Dr Rafi Yoeli.

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Le Cormorant est un UAV (Unmanned Aerial Vehicle) militaire, destiné à porter des charges importantes de manière autonome. Ses capacités d’emport ? 764 Kg (soit 1681 lb), à une vitesse de 100 nœuds (185 km/h), et un rayon d’action qui dépend de sa charge utile, hors fuel (plusieurs centaines de km à vide, environ 50km avec une charge d’une demi-tonne). Il est propulsé par deux turbines soufflantes incluses dans la carlingue (connectés au moteur Turbomeca Arriel 2N) qui lui confèrent des capacités VTOL (Vertical Take-Off and Landing) avec un facteur de taille très compact en comparaison d’un hélicoptère classique (3,5m de largeur, 2m30 de hauteur, 6m20 de longueur), ainsi que par deux rotors horizontaux.

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En pratique, cela revient à emporter des charges lourdes (eau, nourritures, armement), ou plusieurs blessés dans le cadre d’une évacuation sanitaire, par exemple. Les concepteurs ont d’ailleurs prévu que le blessé, une fois embarqué, puisse être connecté via une liaison satellitaire à un centre de télédiagnostic ayant notamment accès à l’évolution de ses constantes vitales.

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De plus, le Cormorant est construit en fibres de carbone, ce qui permet de lui conférer une certaine discrétion radar (la signature infrarouge étant elle aussi réduite par l’emploi de systèmes de refroidissement par air, ce qui donne au Cormorant sa forme un peu étrange). Son système de stabilisation lui permet de résister à des vents de 40 nœuds, même si la vidéo du dernier essai du Cormorant montre que le vol ne doit pas être de tout repos, surtout pour un blessé – voir ci-dessous.

Pour assurer une certaine stabilité, un système original a été développé par Tactical Robotics. Il s’agit de micro-rotors en cascade situés à proximité des turbines soufflantes. Le souci ? Sans un système de stabilisation dynamique, le problème – connu – de ce type de turbine est une sensibilité trop importante notamment aux rafales et vents de travers. Le système imaginé par les concepteurs du Cormorant consiste à disposer des micro-rotors à proximité des turbines (aspiration et sortie), contrôlés électroniquement de manière à générer des forces contraires permettant d’équilibrer le véhicule.

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En ce qui concerne son pilotage, un plan de vol est rentré dans le système de préparation et de conduite de mission (deux valises tactiques avec leurs écrans) – une fois ce plan validé, l’opérateur peut laisser la bête en pilotage autonome, même s’il peut reprendre la main en cas de besoin. Bon, si vraiment il y a un gros souci, le système dispose tout de même d’un parachute avec un système de déploiement par fusée.

Ce type de véhicule semble donc appelé à se généraliser, qu’il s’agisse du côté autonome (drones en tous genres) ou du système de propulsion de type hoverboard. A ce sujet, une pépite française, la société Zapata, a développé un système impressionnant – voir ce post – qui pourrait sans doute être utilisé pour les besoins des Forces Spéciales. Un domaine à suivre, qui montre qu’au-delà des « robots tueurs » et autres fantasmes, la robotique opérationnelle est bel et bien un domaine en expansion, au service des opérationnels et au plus près du terrain.

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Il y a un an, la DARPA (encore elle, mais c’est normal compte tenu des sujets de ce blog) avait lancé un appel à idées portant sur le concept d’emploi de drones aérotransportés. Aujourd’hui, suite à cette consultation, elle lance le programme GREMLINS : un essaim de drones miniatures coordonnés, largués depuis un bombardier ou un avion de transport, et récupérables une fois la mission réalisée.

L’idée de drones opérationnels en essaim n’est pas nouvelle – en revanche, c’est la première fois qu’un programme opérationnel fondé sur un tel concept est lancé, avec des ambitions importantes. En effet, chaque drone Gremlin doit être capable d’accomplir une vingtaine de missions, avec un temps de remise en condition ne dépassant pas 24h. Il s’agit de drones capables d’effectuer des missions de combat.

La difficulté technologique réside dans la coordination entre les différents drones, qui devront opérer ensemble lors de missions sensibles, comme une attaque coordonnée avec un essaim de drones précédant un ou plusieurs chasseurs, et réalisant des missions de reconnaissance, de brouillage ou d’attaque.

Le concept opérationnel pourrait ainsi être d’utiliser des drones projetés en avant du dispositif, afin de détecter une menace, de fournir un ciblage à d’autres acteurs (bombardiers, ou même un autre essaim), ou une capacité de guerre électronique déportée. L’idée est également de saturer les défenses adverses par le nombre d’engins. Enfin, il s’agit également de protéger les appareils de plus grande valeur au centre du dispositif d’attaque.

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Pour réaliser une telle coordination, une technologie d’intelligence artificielle doit être développée et validée opérationnellement.  C’est sans doute là la principale difficulté de ce programme ambitieux, et la raison pour laquelle la DARPA organise le 24 septembre prochain une journée dédiée au sujet.

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La Chine vient de mettre en ligne une vidéo montrant pour la première fois le drone MALE (medium altitude long endurance)  Wing Loong en train de tester son armement (en l’occurrence un missile air-sol). Ce drone, dont l’apparence ne peut manquer de faire penser à un drone Predator, a été présenté récemment au salon du Bourget. Il a une longueur de 9,34 mètres pour une envergure de 14 mètres, et pèse un peu plus d’une tonne.

Construit par AVIC (Aviation Industry Corporation of China), l’engin descend du “Pterodactyle”, un UCAV (unmanned combat air vehicle) présenté à la fois au Bourget et au salon de Zhuhai en 2012. Il pourrait emporter une charge utile plus importante que celle du Pterodactyle, qui était de 200 kg (seulement). 4 armements ont été exposés : le missile air-sol BA-7, la bombe guidée laser YZ-212, la bombe antipersonnel YZ-102A et une bombe guidée miniaturisée de 50 : la LS-6.

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Il est muni d’un moteur à pistons de 101ch et une hélice tripales, et possède un plafond opérationnel de 5300 m, un rayon d’action de 4000 km et une vitesse maximale de 280 km/h (20h d’autonomie). La station de guidage est présentée ci-dessous.

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Le drone possède plusieurs variantes dont le Sky Saker / Rui Ying destiné à l’export et embarquant un radar SAR et un pod optronique, le WJ-1 pour l’attaque au sol ou encore le GJ-1 également destiné à l’attaque au sol, et capable d’effectuer une désignation automatique de cibles.

La video montre le tir de test du Wing Loong, ainsi que la séquence de chargement.

L’ ambition de la Chine n’est pas uniquement technologique. Il s’agit en l’occurrence de fournir une alternative à l’export, pour des pays incapables d’acheter des drones américains ou israéliens en raison de contraintes législatives ou d’embargos. En fait, la Chine n’ayant pas pris part aux accords MTCR (Missile Technology Control Regime) et à l’arrangement de Wassenaar sur le contrôle des exportations d’armes conventionnelles et de biens et technologies à double usage, elle prétend jouer le rôle de challenger à l’export, sans être liée à de telles contraintes.

Dans ce domaine, la Chine, qui fait fabriquer ces engins par des consortiums académiques, ce qui a l’effet immédiat de baisser les coûts de production et le prix de vente, serait un joueur crédible et disruptif. A titre d’exemple, le drone MALE BZK-005, livré à plus de 1500 exemplaires à l’armée chinoise, a été développé par la Beijing University of Aeronautics and Astronautics et le groupe Harbin Aircraft Industry Co., Ltd – la comparaison avec le drone américain MQ1 Predator est présentée ci-dessous.

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Même s’il est aujourd’hui difficile d’évaluer le degré réel de sophistication des drones chinois, la Chine est sans nul doute en train de devenir un acteur réel capable de jouer un rôle de premier plan dans la prolifération de drones aériens militaires.

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La société américaine RAYTHEON vient d’acquérir une petite société de 50 personnes spécialisée dans les solutions à base de drones pour le renseignement et les opérations spéciales. Sensintel, localisée près de Tucson en Arizona, fournit des drones et des composants pour drones (comme des cartes spécialisées de distribution de la puissance des générateurs). Leur drone SILVER FOX D2 est réputé avoir des capacités de reconnaissance, surveillance et renseignement jusqu’alors l’apanage de systèmes plus lourds. C’est un UAV intermédiaire entre un drone de court rayon d’action (Très Courte Portée), simplement opérable, et un drone tactique à moyen rayon d’action. Il peut être porté dans un petit véhicule de type SUV, et opéré par 2 servants en moins de 15 mn.

La charge utile comprend différents senseurs électro-optiques et infrarouge, mais l’originalité consiste à contrôler plusieurs Silver Fox à partir de la même station sol, permettant ainsi une tenue d’information corrélée en temps réel.

SENSINTEL a beaucoup travaillé avec les laboratoires de référence dans le monde du renseignement, et avec les forces spéciales, dans la mise au point de ses drones:  Special Operations Command (SOCOM), Office of Naval Research et Air Force Research Laboratory.

La question était de savoir dans quelle « business line » Sensintel serait intégrée chez Raytheon: a priori, ce sera dans les systèmes d’armes et en particulier dans l’Advanced Missile Systems product line. Cela fait donc penser que les ingénieurs de Raytheon se concentrent sur des systèmes d’armes autonomes et l’intégration de leur offre missile dans une plateforme globale de senseurs intelligents.

Le montant de l’acquisition n’a pas été communiqué.

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Pendant que les affaires sur les survols intempestifs de drones dans des zones urbaines se multiplient (avec notamment aujourd’hui l’arrestation de trois journalistes d’Al Djazeera en train de manipuler un drone dans le bois de Boulogne), le Department of Homeland Security américain a tenu une conférence « ouverte à tous sauf à la presse »( !)  à Arlington, sur les dangers sécuritaires afférents à la multiplication des drones low cost.

A grand renfort de films montrant des drones de loisir équipés d’armes automatiques, ou encore l’attaque victorieuse ( !!) d’un convoi de blindés par des drones armés (pour un montant de moins de 5000$), l’évènement a aussi présenté des modifications de drones en tant qu’engins volants explosifs improvisés, des « flying IEDs ». Vous auriez pu lire le CR détaillé de la conférence sur le site de Daniel Herbert, qui a posté la photo en tête d’article, présentant un drone phantom de DJI, marque chinoise très populaire, avec une charge utile d’1,5 Kg d’explosifs.Mais le DHS lui a gentiment demandé de tout enlever…

De nombreux organismes réfléchissent à la manière technologique de limiter ou de contrôler ces vols de drones. Une des actions envisagées est le « geofencing », consistant à instaurer des zones de non-vol de drones directement en tant que coordonnées GPS dans le firmware de l’appareil. Evidemment, tout ceci suscite une levée de boucliers des pilotes amateurs au nom de la liberté individuelle… (amusant : la première zone que DJI a instaurée en geofencing était la place Tian An Men, sans que personne n’y trouve rien à redire). Nul doute que bientôt, les premières modifications permettant de contrôler le firmware d’un drone ou de l’altérer seront disponibles sur Internet (après tout, il est aujourd’hui possible de modifier le logiciel de votre voiture, bien que cela soit illégal).

La question est donc de savoir si d’autres technologies, externes aux constructeurs, pourront être utilisées pour exercer un contrôle – par les forces de l’ordre, notamment – sur les drones intempestifs. Un rayon laser (comme une version réduite du LaWS américain, dont nous parlerons plus tard) a même été évoqué sérieusement, tout comme les moyens de brouillage directionnel.  Mais aujourd’hui, on pense que la majorité des drones survolant des villes la nuit effectuent un circuit GPS, donc sans besoin d’un lien permanent avec le pilote.

Tout ceci intervient au moment où une start-up portugaise, la société TEKEVER, a montré qu’un pilote équipé d’un casque d’électro-encéphalographie, pouvait contrôler un drone par la pensée.

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Dans l’esprit de TEKEVER, il s’agit de permettre au pilote de se concentrer sur des tâches tactiques complexes, tout en laissant les mécanismes basiques de vol à la charge du drone lui-même. Il reste à espérer qu’un cerveau de terroriste n’est pas à la hauteur de la tâche…