Articles Tagués ‘pile à combustible’

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Oui, de temps en temps, l’innovation technologique prend des chemins inattendus et rejoint une certaine rusticité. C’est le cas ici, avec cette découverte réalisée par (encore lui) le US Army Research Lab, qui a découvert un peu par hasard un phénomène inédit, en combinant de l’urine avec une nouvelle nano-poudre d’aluminium.

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Cette poudre de nanoparticules d’aluminium galvanique possède en effet la propriété de relâcher de l’hydrogène pur, lorsqu’elle est mise en contact avec un liquide comportant de l’eau. Là où cela devient intéressant, c’est que l’hydrogène est capable d’alimenter une pile à combustible. La réaction est simple : l’hydrogène se diffuse au sein d’un empilement de membranes faisant office d’électrolytes et est séparé en protons et électrons, qui se combinent à l’oxygène pour produire de l’électricité (en libérant de l’eau). En gros, c’est l’inverse de l’électrolyse de l’eau : au lieu d’utiliser une source de tension, on alimente en hydrogène et oxygène ce qui permet l’apparition d’une tension électrique. Avec un kg de poudre d’aluminium, on génère ainsi 220kW en seulement 3 minutes.

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Or l’urine humaine est composée à 96% d’eau ; c’est d’ailleurs pour cette raison que l’urine des astronautes est recyclée afin de leur permettre de disposer d’eau potable. Ce qui est étonnant, c’est que la réaction entre la nanopoudre d’aluminium développée par l’US Army Research Lab et l’urine est presque deux fois plus forte et plus rapide qu’avec l’eau, pour une raison encore inconnue sans doute liée à la présence de résidus et à l’acidité.

Dans le cas d’un soldat devant évoluer dans un environnement exigeant (lisez à ce sujet le livre du Général Barrera sur l’opération Serval), pouvoir utiliser l’urine afin de produire de l’énergie est loin d’être anecdotique. Cela permet d’alimenter des systèmes de communication, ou différents capteurs, en utilisant des piles à combustible dont le facteur de forme est particulièrement compact.

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Et surtout cela permet aux fantassins, au lieu d’utiliser de lourdes batteries, de pouvoir compter sur leur corps pour alimenter une source d’énergie à volonté (à condition de boire beaucoup !), en mélangeant cette nanopoudre avec leur urine. Car transporter de l’hydrogène, c’est compliqué (généralement, on doit utiliser des récipients pressurisés, et des catalyseurs) – ici, rien d’autre à transporter que la pile elle-même, le soldat lui-même, et cette nanopoudre.

Reste encore à voir comment cette invention, aujourd’hui au laboratoire, sera capable d’être appliquée sur le vrai théâtre d’opérations, quel en sera le coût, la facilité de production, etc… L’équipe de chercheurs a lancé le brevet correspondant, et va, dans les mois qui suivent, procéder à des expériences de passage à l’échelle.

Reste à savoir qui a eu cette idée de faire pipi sur une nanopoudre d’aluminium, et pourquoi (!) Mystère…

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Après la physique quantique, un article sur une technologie plus classique, mais néanmoins intéressante. On le sait, de nombreux développements technologiques militaires profitent d’innovations développées dans le monde civil (et réciproquement, citons par exemple le GPS, initialement un projet de recherche du ministère de la Défense américain, lancé par Richard Nixon). On appelle cela la dualité, et si tout n’est pas dual (nous y reviendrons un jour), certaines capacités recherchées par le monde militaire bénéficient des investissements réalisés dans le domaine civil. En particulier, l’automobile est un secteur qui a connu un développement technologique explosif ces vingt dernières années ; il n’est donc pas surprenant que de nombreuses innovations irriguent le monde de la défense.

Ainsi, le géant de l’automobile américain General Motors vient ainsi de dévoiler le Chevrolet Colorado ZH2, un « muscle car » à l’américaine, mais doté d’une toute nouvelle technologie de pile à hydrogène (d’où le H2 du nom). La bête fait 3 tonnes, 1m80 de hauteur, 2,13m de largeur, donc des mensurations plutôt impressionnantes. Pour la mouvoir, des pneus de 93cm et surtout une pile à hydrogène de 92kW qui, combinée à un système de type KERS (récupération de l’énergie cinétique lors du freinage) lui donne 174 chevaux immédiatement mobilisables, avec un couple impressionnant.

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Outre le côté écologique (après tout respectable), la technologie de pile à hydrogène possède plusieurs avantages. En premier lieu, il est très facile de produire de l’hydrogène (par exemple à partir de carburant conventionnel) ou d’autres sources d’énergie. Et la vitesse de recharge n’a rien à voir avec un véhicule électrique : en seulement 4 à 5 minutes, le réservoir est à nouveau rempli.

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D’un point de vue militaire, un véhicule à hydrogène possède de nombreux atouts : il est discret en termes de bruit et d’odeur, mais aussi de signature thermique, puisque le moteur et donc le véhicule est plus froid qu’un moteur traditionnel. Et rien n’empêche le conducteur de convertir son véhicule en générateur auxiliaire en utilisant la capacité de production d’électricité de la pile à hydrogène. Ni d’ailleurs de le convertir en point de ravitaillement en eau, résidu généré par le fonctionnement du moteur, qui combine hydrogène et oxygène et produit de l’énergie, et de l’eau.

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Le Colorado ZH2 doit être dévoilé lors du salon AUSA qui a lieu en ce moment. Pour le développer, GM a travaillé avec le TARDEC (U.S. Army Tank Automotive Research, Development and Engineering Center). Et ce n’est pas son coup d’essai : en juin, General Motors avait également dévoilé un drone sous-marin (UUV) développé avec l’Office of Naval Research, doté également d’une pile à hydrogène, aujourd’hui en essais.

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Pas d’autres informations aujourd’hui quant aux performances du ZH2 – mais l’annonce de ce développement a fait réagir le PDG de Tesla, Elon Musk, qui a annoncé lui aussi travailler sur des engins analogues, sans préciser si le monde militaire était lui aussi concerné. En ce qui concerne General Motors, la firme a d’ores et déjà précisé que la technologie développée dans le cadre du projet ZH2 serait adaptée pour le grand public d’ici 4 ans.

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Le salon SOFINS qui vient de s’achever a vu une fréquentation en hausse, et parmi les démonstrations, véhicules et équipements, de nombreuses innovations technologiques étaient présentées. Le SOFINS, dont il s’agit de la seconde édition, est un salon unique dédié à l’innovation pour l’équipement des Forces Spéciales (FS). Il s’est tenu entre le 14 et le 16 avril, au camp de Souge, fief du 13 régiment de Dragons Parachutistes (13e RDP), près de Bordeaux. Si des organisateurs figurent parmi les lecteurs de ce blog, je me permets une petite remarque toute personnelle : compte tenu de la fréquentation – le salon est victime de son succès – et de la difficulté d’accès, je suggère fortement , pour une prochaine édition, de considérer une autre organisation logistique. Mais c’était une petite digression… C’est fou comme 50mn d’attente et de commutation de navettes peuvent rendre grognon, le matin. Bref.

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Parmi les produits présentés, j’ai fait mon marché dans le salon, et les articles qui vont suivre ces prochains jours correspondent à une première sélection. En premier lieu, j’ai choisi de vous parler rapidement de TEYA, une innovation de NEXTER Electronics. TEYA est une pile à combustible compacte (24cm x 10 cm x 10 cm) et portable, qui fonctionne à l’hydrogène, le gaz étant généré par des cartouches développées par BIC. En effet, via le rachat en 2011 par le groupe BIC des actifs de la société canadienne Angstrom Power (pour 18,7 millions de dollars canadiens), BIC a développé et mis sur le marché des consommables sous forme de cartouches à hydrogène qui se connectent à des piles à combustible et sont remplacées une fois le combustible épuisé. La pile en elle même génère 20W, avec une puissance pic de 40W à 60W, pour un poids de 1,8 kg et une durée d’alimentation par charge de 12h. La mise en service est instantanée. La pile délivre un courant nominal de 3.3 A / 1.6 A (12V / 24V).

 

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La batterie est compacte, mais une version existe en rack dans un « fly case » permettant notamment de changer à la volée (« hot swap ») une batterie usagée, et de disposer de davantage de puissance.

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Mais que se passe-t-il si l’on tire dedans? Eh bien pas grand chose, puisque la cartouche BIC de génération d’hydrogène ne génère qu’un très faible volume à un instant donné – en tout cas insuffisant pour causer une explosion de grande ampleur. Et pour fonctionner, le système ne nécessite que de l’eau, une ressource de toutes façons critique.

Par sa compacité, le système paraît donc en première approche particulièrement adapté à un usage opérationnel… si ce n’était son poids, pour l’instant peu compétitif dans le cas d’usage d’un combattant des FS pleinement équipé. Et pour l’instant, une puissance de 20W garantie (même si les 60W peuvent être atteints en puissance « pic ») semble tout juste suffisante à faire fonctionner un netbook, un GPS ou une caméra. Mais il s’agit néanmoins d’une avancée par rapport à la concurrence, tant dans la simplicité d’emploi que dans le facteur de forme, et l’adaptation aux standards militaires (MIL STD 810F) en vibration et en résistance à la chute. Un petit effort sur le poids reste donc, dans un premier temps, la priorité.

De nouveaux articles à suivre sur le SOFINS dans les prochains jours!