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Nous avons déjà parlé dans ce blog d’essaims de drones (voir par exemple cet article sur le programme Gremlins de l’US Air Force, ou celui-ci traitant des drones CICADA). Cette fois ci, il s’agit de la démonstration de la viabilité du concept par une expérimentation en grandeur nature.

Rappelons déjà ce que c’est qu’un essaim de drones : il ne s’agit pas simplement de mettre de nombreux drones ensemble, mais surtout de les faire fonctionner de manière intelligente, adaptative et coordonnées. C’est une problématique étudiée depuis longtemps : dans les années 1990, de nombreux travaux – notamment ceux du Pr Rodney Brooks au MIT (Massachussetts Institute of Technology) – traitaient de la robotique en essaim.

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L’idée est de s’inspirer des capacités des animaux sociaux, et notamment des insectes. Elle consiste à considérer que chaque individu est relativement simple dans son comportement, mais capable de communiquer et de se coordonner avec ses congénères pour produire un comportement complexe et coopératif.  Les avantages de l’adaptation d’une telle approche sont nombreux : la simplicité des unités élémentaires (et donc leur coût), la redondance, la capacité à couvrir des zones importantes (par exemple pour réaliser de la surveillance, ou de la saturation de communications).

L’US Air Force vient d’annoncer qu’ils ont mené le plus grand test d’essaim à ce jour : 3 avions F18/SuperHornet ont ainsi largué 103 (!) drones Perdix pour une simulation de mission coopérative de surveillance. Et avec succès.

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Le drone Perdix est un drone simple, développé lors du programme PERDIX doté de 20 millions de dollars (donc un petit programme) – il est aujourd’hui dans sa sixième version. Chaque drone, d’une envergure de 30 cm, pèse 300g environ et est construit en kevlar et en fibres de carbone. A l’origine conçu par le MIT, le Perdix (sans « r ») est capable de voler à 112km/h, et est doté d’une micro-caméra et d’une batterie au lithium. Le drone est développé à partir de composants sur étagère (composants de smartphones, en particulier) et est fabriqué en utilisant des techniques de fabrication additive (impression 3D).

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Le Perdix ne possède pas d’intelligence « locale » : un système distribué réparti leur confère une intelligence collective, chaque drone se synchronisant ensuite avec ses voisins immédiats. Si la mission est donc claire, la manière de la remplir dépend de la configuration de l’essaim, et s’adapte en conséquence (ci-après, une image de l’une des configurations). C’est d’ailleurs la seconde expérimentation : lors de la première, 90 drones avaient montré avec succès leur capacité au vol collaboratif.

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Comme on le voit dans la vidéo ci-après, la démonstration a montré avec succès que l’essaim pouvait adopter différentes configurations de vol correspondant à une simulation de mission de surveillance.

Au-delà de l’exercice lui-même, le programme Perdix est innovant, car il s’appuie sur le DIUx (Defense Innovation Unit eXperimental), une structure créée il y a deux ans dans la Silicon Valley par le Secrétaire d’Etat à la défense actuel, Ashton Carter (lui-même ancien chercheur en physique théorique). La structure cherche d’ailleurs aujourd’hui un industriel capable de produire plus de 1000 drones Perdix.

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DIUx est un poste avancé de la défense américaine en Silicon Valley, chargé de s’assurer que des technologies critiques n’échappent pas à la Défense américaine. Il rassemble des spécialistes en technologies, des industriels et des investisseurs en capital risque. DIUx répond à la difficile question du financement de l’innovation de défense, en s’assurant que des start-ups innovantes peuvent accéder à des programmes gouvernementaux sans en subir les inconvénients (notamment la longueur des cycles). La démarche est intéressante et mérite d’être étudiée pour notre pays – reste à voir si, aux Etats-Unis, elle survivra à la prochaine présidence…

 

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L’idée n’est pas nouvelle. Dans une ancienne vie, j’avais moi-même travaillé sur l’utilisation de réseaux de neurones et de techniques d’intelligence artificielle pour la modélisation du comportement normal d’un réseau de télécommunications, afin de détecter les écarts à la normale, pouvant signifier l’occurrence d’une intrusion. Le projet s’appelait M>Detect et avait été réalisé avec Matranet (pour les nostalgiques). Et cela fonctionnait… jusqu’au rachat de Matranet, mais ceci est une autre histoire.

Aujourd’hui, le monde entier s’enthousiasme pour l’intelligence artificielle (IA) – au passage, cet enthousiasme galopant est consécutif à la définition d’un concept marketing alliant réseaux de neurones et puissance de calcul, sous la dénomination de « deep learning ». Bref. En l’occurrence, il s’agit d’un projet du célèbre laboratoire CSAIL (Computer Science and Artificial Intelligence Laboratory) du MIT (Massachussetts Institute of Technology), qui a développé un système baptisé AI2 afin d’examiner les enregistrements (logs) d’un réseau afin d’y détecter toute anomalie pouvant être caractéristique d’une cyberattaque.

L’idée est toujours la même : permettre aux experts de réaliser un tri dans le volume gigantesque de données transitant par le réseau, sans avoir de silence (i.e. manquer une attaque).

Finalement, la technique est relativement classique : enseigner à un système la signature caractéristique de prémices d’une attaque comme par exemple une augmentation subite de connexions sur un compte utilisateurs, pouvant indiquer une attaque visant, par la force brute, à « cracker » un mot de passe.

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AI2 fonctionne par apprentissage. Le premier jour, le système utilise des règles et heuristiques déterminées à l’avance, et réagit en identifiant des anomalies (les 200 anomalies les plus caractéristiques par phase d’apprentissage). Ces anomalies sont présentées à un expert ou à un groupe d’expert qui n’indique que les signatures correspondant véritablement à des attaques. Puis le système apprend, et continue à présenter les signaux aux experts, et ainsi de suite. La vidéo ci-dessous présente le concept.

Rien de nouveau sinon que AI2 semble fonctionner là où d’autres systèmes plafonnent péniblement. Sans doute de par l’impressionnante puissance de calcul disponible aujourd’hui, après 3 mois d’analyse (soit 3.6 milliards de logs réseaux analysés), AI2 identifiait 85% des signes caractéristiques d’attaques (alors qu’un simple apprentissage non supervisé n’atteint qu’un taux de succès de 8%). AI2 est le premier système à atteindre un tel niveau de performances, sans doute par l’apprentissage non supervisé de signaux caractéristiques dans les logs réseaux, et un apprentissage supervisé utilisant les retours des experts.  Au lieu d’examiner plusieurs milliers de logs par jour, une fois le système « éduqué », chaque expert ne doit plus examiner qu’entre 30 et 40 événements par jour : une tâche réalisable sans problème par un opérateur humain.

Le laboratoire a présenté un article lors du  IEEE International Conference on Big Data Security à New York. Un travail à suivre, notamment afin de déterminer si, en miroir à cette technique, il serait possible de dériver un système capable d’imaginer des stratégies de réponse, voire d’attaque.

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Ou plus exactement, par l’utilisation de MEMS à base de graphène ; une phrase qui nécessite quelques explications. En premier lieu, qu’est-ce que le graphène ? Il s’agit de cristal de carbone pur bidimensionnel (en gros une monocouche de carbone) obtenu soit directement à partir du graphite, en le « pelant » pour séparer les couches, soit par synthèse, par exemple en faisant chauffer à plus de 1000 degrés un catalyseur sur lequel un gaz d’hydrocarbure va se dissocier et déposer des atomes de carbone.

Le graphène est un matériau conducteur qui possède de très nombreux intérêts (des processeurs à base de graphène devraient d’ailleurs bientôt voir le jour) – parmi ceux-ci, un coefficient Seebeck unique (décidément, cet article devient de moins en moins lisible). En gros, un pouvoir thermoélectrique remarquable : un senseur à base de graphène est sensible à la totalité du spectre infrarouge.

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Des chercheurs du MIT ont donc annoncé avoir combiné un capteur thermoélectrique à base de graphène avec un MEMS (micro système électromécanique) composé d’une membrane de nitrure de silicium. Le résultat : un capteur capable de détecter les températures du corps humain, dans une pièce à température normale (pour les connaisseurs du domaine, on obtient des réponses de 7 à 9 V/W, pour une longueur d’onde de 10.6 microns et une constante de temps de 23ms). Bon, je ne rentre vraiment pas dans une explication exhaustive: vous trouverez (en payant), l’article ici.

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Il s’agit d’une innovation qui devrait révolutionner le domaine de la vision thermique. Car jusqu’ici, pour détecter des signatures thermiques à température normale, les senseurs devaient être refroidis par cryogénie, afin de supprimer le bruit de fond du aux radiations thermiques de la pièce.

Les capteurs étaient donc chers et volumineux, afin d’intégrer les composants nécessaires pour le refroidissement. Avec cette nouvelle technologie, sans rentrer dans les détails, il devient possible de développer un système de vision thermique très compact, voire flexible et transparent. De là à imaginer des «lunettes thermiques » ou même des « lentilles thermiques », il n’y a qu’un pas. Un pas d’ailleurs déjà franchis par une équipe de recherche de l’université du Michigan qui, il y a un an, avait présenté un prototype d’une lentille de contact infrarouge, toutefois moins sensible ‘voir photo ci-dessous) que le détecteur construit par le MIT. Cette sensibilité était le seul vrai obstacle au développement de lentilles thermiques. Le MIT annonce travailler maintenant sur un senseur fondé sur une seule couche de graphène.

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Maintenant que la faisabilité est avérée, nul doute que dans le futur proche, des nouveaux senseurs infrarouges portables et haute définition verront le jour, et ce pour un coût raisonnable. Entre les processeurs, les gilets pare-balle, les écrans et maintenant la vision thermique, le 21e siècle est bien l’ère du graphène.

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Une équipe de recherche américano-israélienne du MIT et de l’institut Technion a tenté de reproduire les écailles du poisson Pirarucu, parmi les plus solides au monde. Le prototype, imprimé par l’équipe du Pr Stephen Rudykh en 3D, illustre un nouveau concept d’armure, qui serait capable de procurer une protection aux balles comme aux coups de couteau. La flexibilité du matériau pourrait également permettre de protéger les astronautes contre les micro-météorites rencontrées en orbite.

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L’US SOCOM (commandement des Forces Spéciales américaines) s’intéresse de très près aux technologies de protection balistique individuelles. Parmi ses projets, voici TALOS (Tactical Assault Light Operator Suit), une armure un peu spéciale puisqu’elle est développée par le MIT (Massachusetts Institute of Technology) et possède une panoplie technologique impressionnante.

Parmi les innovations, TALOS possède par exemple son propre système de génération de chaleur, d’énergie, et même d’oxygène. L’armure est supposée pouvoir « envelopper » le corps du fantassin, et permettre de remonter des informations sur l’état physiologique du soldat (température de la peau, rythme cardiaque, hydratation…) ainsi que l’état énergétique de ses équipements, grâce à un réseau de micro-capteurs. Elle sera même capable de prodiguer les premiers soins, en générant une mousse qui sera diffusée sur la blessure ouverte pour permettre une première coagulation et gagner du temps en attendant l’évacuation du personnel concerné.

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Pour ce faire, TALOS incorporera une « armure liquide », en fait un matériau magnétorhéologique à base de nanoparticules, capable de changer son état de liquide à solide en quelques millisecondes, lorsqu’un champ magnétique ou électrique est appliqué. La technologie est en cours de développement au MIT, l’ambition de l’armée américaine étant de permettre à un fantassin de résister à un feu direct – le concept (un peu romancé) est présenté ci-dessous par un film d’animation très « marvelien ».

De l’aveu de l’US SOCOM, l’épisode malheureux connu par l’armée américaine à Mogadiscio, repris dans l’excellent film « la chute du faucon noir » a marqué durablement les esprits et est à l’origine d’un nombre conséquent de projets de recherche sur le sujet de la protection du fantassin individuel. Les premières démonstrations de TALOS auront lieu entre le 8 et le 10 juillet près de la MacDill Air Force Base.