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Au cours d’un déplacement à Washington, j’ai eu le privilège de visiter les laboratoires Battelle, et de voir une présentation d’un système innovant de collecte et d’identification des menaces chimiques et biologiques…Du coup, je ne résiste pas (après avoir analysé un peu plus finement le système), à en parler dans ce blog.

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Battelle est une société peu connue du grand public, mais passionnante, un croisement entre entreprise, laboratoire et fondation à but non lucratif (mais avec des filiales qui, elles, n’ont pas cette limitation, je vous rassure tout de suite). Un OVNI fondé par Gordon Battelle en 1929, un industriel dans l’acier, qui a souhaité léguer sa fortune pour « utiliser la science et les découvertes technologique afin de faire avancer la société »… J’avais déjà eu l’occasion d’en parler dans cet article… Battelle est impliquée dans un grand nombre de projets, dont notamment le « drone defender », un système permettant de brouiller le GPS et de pirater la liaison sol d’un drone pour en prendre le contrôle à distance (ci-dessous).

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Mais revenons à REBS. L’acronyme signifie « Resource Effective Bio-Identification System » – il s’agit d’un laboratoire mobile autonome, capable de collecter les particules dans l’air ambiant et d’en réaliser l’analyse. Pas besoin d’épiloguer sur les applications, l’actualité montre cruellement la prégnance de telles menaces. Le système fournit une analyse des menaces de type bactéries, virus, aérosols chimiques, et toxines, sans avoir besoin de recourir à un laboratoire ou un service extérieur. Le constructeur annonce une capacité de reconnaissance de 100 menaces différentes en moins de 15mn.

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Le système est particulièrement compact (il mesure 46x30x30 cm et ne pèse que 16kg). Il est muni de batteries capables lui assurer une autonomie complète de 18h. Son fonctionnement repose sur la spectroscopie de type Raman. Pour faire simple, la spectroscopie Raman (du nom de son inventeur), est une technique d’analyse non destructive, fondée sur la détection des photons diffusés suite à l’interaction d’un échantillon avec un faisceau de lumière monochromatique. En gros, on éclaire un échantillon au laser, et sa diffraction caractérise sa nature – cela permet d’analyser tous les matériaux (même gazeux) par la signature de diffusion d’un laser optique.

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Dans le cas de REBS, les concepteurs ont à la fois travaillé sur l’automatisation du processus de spectroscopie, et l’optimisation de la collecte des échantillons dans l’air ambiant. L’identification des éléments biologiques (bactéries ou virus) se fait par l’analyse spectrale de la membrane cellulaire, de l’ADN ou de l’ARN présent, du contenu intracellulaire ou encore des capsides ou enveloppes virales. Pour les molécules, les liaisons, ou la conformation moléculaires participent également à l’identification. Celle-ci repose sur une approche en trois phases : discrimination « composant organique ou inorganique « (en 0.1s), discrimination « composant biologique ou non » (en 10 s) et identification de la nature de la menace (50 s). On obtient à la fin un signal caractéristique de la menace (ci-dessous, signature spectrale d’une bactérie de type Bacillus Subtilis)

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Le système conserve chaque échantillon (il fonctionne comme un ruban, enchâssé dans une cartouche, qui collecte des échantillons et les soumet à l’analyse spectrographique). L’image ci-dessous montre les différents composants du système, ainsi que la cartouche de collecte. Le bidule noir qui ressemble à une cheminée est le système d’aspiration et de collecte des aérosols.

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En cas de détection positive, l’échantillon concerné peut être soumis à un autre laboratoire pour une confirmation en utilisant d’autres techniques (comme une analyse d’ADN par exemple). Et Battelle annonce un taux de fausses alarmes presque nul. En outre, le système est particulièrement économique puisque son coût d’exploitation est annoncé à 1 dollar par jour (sans coûter le coût d’acquisition, aux alentours de 100k$ par système)!

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Il s’agit donc d’un outil nouveau et performant, qui peut également fonctionner de manière connectée, en tant que noeud d’un réseau de stations de surveillance. Mais il n’y a pas de mystère : Battelle travaille sur le développement de son système depuis…2009 !

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Parfois l’innovation concerne des domaines de la défense autres que les drones, les robots, l’aéronautique ou la cyberdéfense. C’est par exemple le cas de la destruction de munitions, un problème récurrent pour les armées, notamment lorsqu’il s’agit de vieilles munitions de la première guerre mondiale avec des composants chimiques.

A Hawaii, dans les « Schofield Barracks » du champ de tir de Fort Shafter, l’US Army a installé un dispositif innovant pour la destruction sécurisée de munitions, l’EDS pour Explosive Destruction System.

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Le système permet de détruire les munitions sensibles comme les munitions chimiques, dans un système qui utilise des sas de confinement redondants, testés par détection de fuite d’hélium. Le système a été conçu par les Sandia National Labs ; il permet non seulement de confiner l’explosion provoquée par des charges linéaires placées le long des munitions – et donc l’effet de souffle, mais également de récupérer les fragments et la vapeur générés.

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Les armes chimiques que l’on peut traiter par l’EDS incluent : gaz moutarde, phosgene, agents de type G, VX, Lewisite, cyanogene, chloride, cyanure d’hydrogène,et la chloropicrine. Les obus jusqu’à 155mm sont traités. Bien que compact, le système nécessite une infrastructure de sécurité complète, telle que présentée ci-dessous.

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L’armée américaine dispose de 5 EDS transportables, deux conçus en 2001 et trois dits « phase 2 » car de nouvelle génération.

Photos et illustrations (c) US Army

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Le domaine des RFID ne cesse de progresser (rappelons que l’on désigne sous cet acronyme des dispositifs d’identification par radio-étiquettes permettant de mémoriser des données à distance, et de les récupérer). Le département Global Research de la société GE cherche ainsi à développer une technique économique et mobile, aisément déployable, de détection d’agents chimiques dangereux sans supervision humaine. Cette nouvelle étiquette est supposée pouvoir détecter explosifs et agents oxydants (bon, peu de détails fournis par le fabricant, et l’on comprend aisément pourquoi). Opérant sans batterie, ces étiquettes peuvent être placées dans des soutes ou containers de cargo, des aéroports ou gares, des infrastructures administratives… et permettre une détection efficace pendant des mois sans avoir besoin de recharge ou de remplacement.

La faible portée du détecteur (notamment pour permettre sa lecture), typiquement de 3,5m au max, peut être compensée par la possibilité d’en déployer un grand nombre dans un lieu unique, le coût unitaire étant annoncé comme négligeable.

L’intérêt est ainsi de pouvoir permettre une détection sans proximité physique avec la substance dangereuse, et sans recours à des ressources précieuses comme les chiens. La commercialisation n’est pas encore effective, mais doit survenir dans les prochaines années.