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On se croirait dans un James Bond : la navette X-37 américaine vient de passer un an en orbite, en toute discrétion, et ce n’est pas la première fois.

Si vous ne connaissez par la X-37, c’est normal puisque cette navette robotisée développée par Boeing et opérée par l’US Air Force n’a pas vocation à faire parler d’elle. Au départ, cet engin était un démonstrateur destiné à valider les nouvelles technologies notamment de décollage, et de rentrée dans l’atmosphère. Son premier lancement dans sa version actuelle baptisée X37B OTV (Orbital Test Vehicle) a eu lieu en 2010, depuis Cap Canaveral, et a donné lieu à sa mise en orbite basse par une fusée Atlas V501.

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Sa mission ? Inconnue. Car la navette a pour objectif de tester des technologies militaires (mais pas forcément des technologies de systèmes d’armes).

La navette n’est pas très grande : elle mesure 8,38 m pour une envergure de 4,57 mètres, avec une masse totale à vide n’excédant pas 3,5 tonnes. C’est une mini-navette (même mode de rentrée, même architecture générale que la navette STS classique américaine aujourd’hui abandonnée), capable d’atteindre une orbite comprise entre 230 et 1 064 km d’altitude et dotée d’une autonomie de 470 jours.

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Un exemple de technologie sans doute testée par cet engin : le moteur à propulsion ionique à plasma stationnaire (propulsion par effet Hall). Il s’agit de propulser l’engin en ionisant un gaz comme le xénon, grâce à un champ magnétique. Le gaz ionisé produit alors une poussée avec une accélération  comprise entre 10 km/s et 80 km/s. On appelle cela un propulseur magnéto-plasma-dynamique (ouf). La photo d’un tel propulseur ci-dessous:

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D’autres types de missions sans doute effectuée par la navette : tester des nouveaux capteurs militaires, notamment dans le domaine ELINT (renseignement électronique), ou même tester des moyens anti-satellitaires (neutralisation ou capture d’un satellite en minimisant les dégâts collatéraux). Mais le X37 est une véritable machine à fantasme : il suffit de parcourir Internet pour voir surgir les théories du complot, depuis l’avènement d’une « super-arme spatiale » jusqu’à la coopération avec les extraterrestres…C’est cela, oui…(!)

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Plus sérieusement, c’est la 4e mission de longue durée pour le X37. Il existe deux exemplaires de cet engin aujourd’hui, et parmi les missions moins…romantiques, quelques experts pensent qu’une des tâches du X37 serait de tester la faisabilité d’une résilience satellitaire, soit la capacité de remplacer des satellites militaires en orbite, en cas de dégradation.

Si vous souhaitez en savoir plus sur l’engin, voici une vidéo qui spécule sur ses missions…Mais vous verrez apparaître rapidement un bandeau « top secret », et la vidéo a d’ailleurs été supprimé de la majorité des réseaux et sites (YouTube en tête) par l’US Air Force. Du marketing, de l’intox, ou… ? Sans doute tout cela à la fois.

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Les satellites géostationnaires civils et militaires posent aujourd’hui de nombreux problèmes quant à leur maintenance. A 36 000 km de la Terre, il est en effet impossible d’envoyer des missions de réparation ou de mise à jour de leurs composants ; ils sont donc aujourd’hui contraints d’embarquer de nombreux systèmes redondants pour pallier d’éventuelles défaillances, et du carburant afin d’ajuster, le cas échéant, leur position. Sans mentionner l’obsolescence de la charge utile, qui est vouée à rester dans l’espace jusqu’à la fin de la vie du satellite.

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Plutôt que de multiplier les nouveaux satellites, la DARPA a lancé une nouvelle idée sous la forme d’un programme appelé Robotic Servicing of Geosynchronous Satellites (RSGS). Il consiste à développer d’ici 5 ans une approche fondée sur des technologies de robotique orbitale, afin d’aller au plus près des satellites géostationnaires afin de les inspecter, de les réparer ou de remplacer certains composants devenus obsolètes.

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Le vecteur serait un RSV (robotic servicing vehicle), financé par l’industrie, alors que le lancement et le contrôle des missions seront assurés par les services de l’Etat.

L’approche repose sur un concept de bras robotisé développé par la DARPA, et baptisé FREND pour Front-end Robotics Enabling Near-term Demonstration (comme quoi la DGA – que je salue – n’a pas le monopole des acronymes complexes). Le bras a été conçu pour opérer sur des satellites non conçus à l’origine pour recevoir des opérations de maintenance.

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 Il s’agit d’un projet développé depuis 2005, et, anecdote amusante, pour le tester, la DARPA a du développer une table à air pulsé de 4m par 6m en granit, afin de reproduire le comportement des objets flottants dans le vide (photo ci-dessous).

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Le bras FREND sera amélioré, notamment d’un point de vue logiciel, en embarquant des senseurs supplémentaires, ainsi que des capacités logicielles de vision autonome pour faciliter les opérations d’appariement et de réparation. Le système met également en œuvre une simulation physique afin de générer des plans de réparation, testés au sol avant d’être transmis au RSV.

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Le programme RSGS fera l’objet d’un appel à propositions dans les prochains mois. Cette approche de partenariat public/privé pourrait mener au lancement du premier RSV dans un horizon de 5 ans.

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Avez-vous vu le film « Gravity ». Si oui, vous savez ce que c’est que le syndrome Kessler : une collision en chaîne, une réaction exponentielle entre débris orbitaux, potentiellement catastrophique. Car comme le dit Alexandre Astier dans « l’Exoconférence » (que je ne saurais trop vous conseiller, même si cela dépasse largement le cadre de ce blog) : là haut, si vous rencontrez une poussière, « CarGlass, il ne répare rien du tout » (!).

Pour donner une idée, un débris spatial voyage en moyenne à dix fois la vitesse d’une balle de fusil. Et les 500 000 débris qui orbitent autour de la Terre constituent une menace considérable pour tous les systèmes en orbite (et notamment militaires). Pour en donner une idée, en 2009, un satellite russe en panne est rentré en collision avec un satellite Iridium américain, générant plus de … 2, 000 débris de taille « notable ».

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Le problème est donc (avant de parler de débarrasser l’espace de tels débris, ce qui fera l’objet d’un autre article) d’être capable de repérer, suivre et identifier ces débris. Les militaires viennent alors à la rescousse.

En premier lieu, l’US Air Force a demandé à la société Lockheed Martin de concevoir un système capable de suivre les débris en orbite. Ainsi a vu le jour le système Space Fence : un programme fondé sur des radars au sol, capables de tracker les débris en orbite.

Ce radar utilise un nouveau circuit intégré à base de semiconducteurs de nitrure de Gallium – une nouvelle technologie permettant notamment une plus grande sensibilité, et une meilleure fiabilité. Il s’agit d’un projet d’envergure : plus de 400 radars opérants dans la bande S vont scruter le ciel à compter de 2017.

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Mais ce réseau est d’ores et déjà complété par un site australien OSSTM, opérant un réseau de capteurs optiques. Cette nouvelle installation, baptisée Optical Space Services (OSS), complètera donc le projet Space Fence de Lockheed. Il s’agira de mettre en œuvre et de fusionner des systèmes à base de capteurs laser et optiques, et surtout de proposer des services en boucle courte aux opérateurs de satellites : en prévoyant la trajectoire des débris, il s’agit de reprogrammer les manœuvres satellitaires pour éviter les collisions les plus meurtrières.

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Il convient ensuite de se débarrasser des débris en orbite ; mais cela, ce sera l’objet d’un autre article dans ce blog.

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Encore un nouveau programme impressionnant à la DARPA. Le projet Phoenix avait déjà permis de montrer la faisabilité du recours à la robotique en orbite pour maintenir, réparer ou assembler des satellites. La video ci-dessous présente le principe du projet.

Mais la DARPA (on rappelle : Defense Advanced Research Projects Agency) américaine veut aller plus loin, avec le projet Dragonfly, récemment attribué à la société Loral / Space Systems. Il s’agit cette fois-ci de concevoir des satellites capables de s’auto-assembler en orbite, après avoir été amenés à bord d’un véhicule spatial de transport.

L’idée est à la fois de maîtriser les coûts de maintenance et de réparation, mais également de permettre d’acheminer des systèmes trop volumineux pour être transportés assemblés par un véhicule spatial classique, comme des paraboles radio HF. Ces systèmes seront acheminés en pièces détachées, et assemblés en orbite par des robots.

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Le programme se fera en collaboration avec la NASA, et comporte une première phase de 5 mois amenant au développement d’une démonstration de faisabilité au sol, avant d’engager des essais en vol.

Ce projet se rapproche d’un programme conduit par les sociétés Nanoracks et Made in Space, visant à utiliser des capacités d’impression 3D déployables en orbite. Les sociétés ont déjà proposé de développer des satellites à façon via des technologies d’impression 3D. L’étape suivante consiste à proposer un service appelé « Stash and Deploy », afin de construire des composants satellitaires en orbite basse.

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Des initiatives se multiplient dans le domaine, avec en ligne de mire une réduction des coûts (déjà bien engagée si l’on regarde les offres de sociétés comme SpaceX), une simplification de la maintenance, et une augmentation de la complexité des systèmes déployables en orbite.