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A l’heure de l’ouverture du salon international de l’aéronautique et de l’espace au Bourget, voici une innovation qui nous vient (encore une fois, et j’en suis désolé) d’outre-Atlantique. L’idée a beau être simple, le concept est innovant : utiliser du métal liquide pour adapter une antenne unique à différentes fréquences.

Le problème est en particulier celui de l’emport d’une grande quantité d’antennes, chacune étant dévolue à une fonction et à une fréquence. Or sur un aéronef, le poids et l’encombrement sont des facteurs déterminants. Utiliser une antenne unique pour différentes fréquences et différents emplois est donc une solution séduisante. Pour peu qu’une antenne puisse le faire.

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Pour arriver à une telle prouesse, le AFRL (encore lui : le US Air Force Research Lab) a développé le concept d’une antenne remplie de métal liquide, reconfigurable, permettant d’émettre et de recevoir à différentes fréquences, et à différentes orientations.

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Le principe ? Incorporer des canaux avec différents motifs (ci-dessus) dans la structure même de l’avion, dans lesquels le métal liquide est injecté. Ce liquide est en fait constitué de nanoparticules de métal. Il s’agit d’alliages à base de Gallium, ayant le triple avantage d’être conducteurs, non toxiques (à la différence du mercure) et liquides à 30°C. Si on associe le Gallium avec d’autres métaux comme l’Indium, on peut encore abaisser le point de fusion ce qui permet d’avoir une antenne « malléable » à température ambiante. L’image ci-dessous montre la malléabilité d’un tel alliage.

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 L’équipe ayant démontré la viabilité du concept est composée des Drs. Jeff Baur et Michael Durstock « du « Materials and Manufacturing Directorate » et des Dr. Michelle Champion du « AFRL Sensors Directorate » et « Dave Zeppettella » du Aerospace Systems Directorate. Alors qu’une antenne traditionnelle n’opère que dans une fréquence donnée, en fonction de sa position et de sa taille, le métal liquide permet de moduler automatiquement – en théorie – l’antenne, et ses caractéristiques. Une telle antenne peut, en laboratoire, recevoir et émettre dans des fréquences comprises entre 70MHz et 7GHz. Pas mal…

La vidéo ci-dessous, qui date de deux ans, présente le concept.

Dans le domaine qui nous intéresse, le principe a été récemment démontré lors du DoD Lab Day du Pentagone. Et l’idée est de diriger en temps réel le métal à l’intérieur de la structure d’accueil afin d’adapter les fonctionnalités de l’antenne.

Pour aller plus loin, il faut que cette structure d’accueil soit elle-même flexible, de manière à pouvoir la déformer, la tordre ou l’étirer en fonction des caractéristiques souhaitées. Pour ce faire, l’AFRL travaille avec des structures comme NextFlex, spécialisées dans le domaine de l’électronique hybride flexible.

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La plus grande difficulté technique réside dans le contrôle de l’interaction entre le métal liquide et les structures électroniques d’accueil, et dans le fait de se débarrasser des résidus laissés quand le liquide quitte un canal pour être injecté dans un autre – ce qui peut provoquer des interférences.

Les chercheurs considèrent que le prototype de laboratoire a démontré la viabilité du processus, et que les futurs aéronefs pourraient bénéficier d’antennes en métal liquide d’ici 10 ans au maximum. Avec des retombées non prévues, comme par exemple des circuits électroniques à base de métal liquide, capables de s’auto-réparer. Les auteurs de science-fiction (voir Terminator 2) avaient donc du flair…

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W-Band-Radar Demonstrator

Décidément, les radars qui tiennent dans la main ont la cote (voir mon article sur la puce développée à NTU). Des chercheurs de l’Institut Fraunhofer viennent en effet d’annoncer avoir développé un radar à haute fréquence capable de scanner son environnement sur 360°, et qui est suffisamment compact pour tenir dans la main.

Il s’agit en fait d’un capteur millimétrique, opérant à une fréquence de 94 GHz dans une bande de 15 GHz (bande W). Ces ondes millimétriques (la longueur est en effet comprise entre 1mm et 10mm), à la différence des fréquences optiques, sont capables de traverser tout matériau diélectrique (isolant électrique, en clair). Parmi ces matériaux : le verre, le bois, le plastique… Cela signifie qu’un tel capteur voit à travers ces obstacles, comme à travers la pluie, la poussière ou le brouillard. On imagine évidemment les applications militaires d’un tel dispositif.

Si l’on compare avec des systèmes identiques en service aujourd’hui, l’innovation est évidente : on passe d’un dispositif radar à base d’un substrat de céramique, et pesant plus de 5kg à une technologie de semiconducteurs à arséniure de gallium tenant dans l’équivalent d’une boite de cigarettes (pour être précis : 78 x 42 x 28 mm), et ne générant qu’une puissance de 10 milliwatts. Le composant critique en ce cas est le module haute-fréquence développé par l’Institut Fraunhofer.

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Le système de scan repose également sur une antenne, possédant une lentille diélectrique et jouant le rôle d’émetteur et de récepteur. Elle comprend un miroir rotatif capable de guider les ondes millimétriques de manière à scanner l’ensemble du périmètre (ci-dessous). Bon, OK, j’ai un peu survendu : le scanner au complet mesure 20cm de diamètre (avec le paquet de cigarettes en question à sa base) et 70cm de haut. Il n’empêche qu’il s’agit d’un dispositif portable et léger, et ce grâce au module radar qui, lui, tient bien dans la main.

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Un fantassin muni d’un tel dispositif pourrait détecter des objets à une distance de 3 km (cela dépend évidemment de leur taille), et ce sur 360° ! De la même manière, un drone muni d’un tel radar peut assurer ainsi une surveillance optimale de zone – au-delà de la détection, on peut également déterminer la direction de mouvement de la cible. Une nouvelle ère, donc, pour la détection d’objets ou de cibles sur un théâtre d’opérations.

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La société canadienne Kongsberg Gallium a développé un système intégré de commandement permettant de déployer des minidrones tactiques. La société, filiale à 100% du groupe Kongsberg, développe des solutions de type C2 (command and control) depuis plus de 20 ans. Leur système VICS (Vehicle Integrated Combat System) mêle des capacités C2 avec un système de gestion du blindé. Il est en service dans plusieurs pays de l’OTAN.

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L’innovation présentée récemment consiste à pouvoir contrôler, à partir du système, un microdrone, le ProxDynamics PD-100 Black Hornet. Il s’agit d’un petit drone (la société le baptise « nanodrone », même si je n’aime pas le terme)  à voilure tournante, électrique, de 18g. Il tient dans une poche, a fortiori dans un véhicule. Avec 25 mn de temps de vol à 5 m/s, et une capacité de maintenir une liaison de données sur une portée de 1,5 km, c’est un système léger de reconnaissance tactique et de surveillance.

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Les drones sont ainsi déployés via les trappes du véhicule, et les images reçues directement sur le terminal VICS. La vidéo ci-dessous présente le concept.

Un premier pas vers l’intégration d’une « microbulle aéroterrestre robotisée »…

Images (c) Kongsberg, ProxDynamics