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Bon, on ne peut pas dire que le design de montres soit le point fort de la société Armatix. Sa montre connectée ne déparerait pas sur l’étagère d’un sportif des années 80. Mais il s’agit d’un concept intéressant, au croisement entre l’internet des objets et l’industrie de l’armement. Explication.

La société allemande Armatix GmbH, créée en 2004, s’est rendue célèbre par ses solutions de sécurisation d’armes de poing QuickLock et Baselock. Il s’agit de mécanismes mécaniques et électroniques permettant de sécuriser une arme en insérant un système de verrouillage (ci-dessous) dans le canon (pour les armes de poings) ou dans la chambre (pour les armes longues). Une fois inséré, il est impossible de supprimer le verrouillage sans rendre l’arme inutilisable, sauf à libérer le mécanisme par un code PIN, ou une combinaison empreinte digitale/code.

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Baselock reprend ce principe en concevant des « cabinets sécurisés » immobilisant le canon de l’arme tant que le code n’est pas entré.

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Mais la société a poussé le concept plus loin, avec son produit Smart System (oui, bon, ce ne sont pas des champions du marketing non plus). Il s’agit en l’occurrence d’une montre RFID qui dialogue avec le mécanisme interne de l’arme de poing : cette dernière (en l’occurrence, un pistolet IP1 développé sur fonds propres, de calibre 22). A quoi cela sert-il ? En premier lieu, à contrôler le statut de l’arme sur la montre, et notamment le niveau de munitions dans le chargeur.

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Mais la principale fonction de cette technologie, c’est de n’autoriser l’utilisation de l’arme que dans un rayon spécifique autour de la montre. Ainsi, en cas de vol, de perte, ou si le tireur est désarmé, l’arme devient inutilisable. Une autre application (TRS ou Target Response Systems) concerne les stands de tir : il est possible de n’autoriser le tir de l’arme que sur une cible RFID, et par un utilisateur donné ; si le tireur vise très en-dehors de la zone de ciblage, le tir est bloqué (ce qui permet de sécuriser les stands pour éviter tout incident de tir).

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La technologie fonctionne aujourd’hui parfaitement avec le pistolet IP1, et la société a entrepris des discussions avec d’autres partenaires pour adapter cette solution à d’autres armes de poing. Mais si le concept est original, il semble toutefois que la rentabilité ne soit pas au rendez-vous pour Armatix qui affiche plus de 14 MEUR de pertes et est placée en redressement judiciaire.

Arme trop chère (a priori 4x plus chère qu’une arme normale) ? Trop peu de demandes ? La question reste ouverte mais la récente éviction du P-DG Ernst Mauch intervient dans un débat dominé par la question de la viabilité industrielle de cette innovation, et de son adoption par le marché. Ce n’est pas le cas aux Etats-Unis en tout cas : sur 1200 licenciés interrogés, plus de 75% rejetaient le concept d’un « smart gun » qui pourrait être désactivé sans leur consentement. Mais à mon sens, le principal obstacle reste la vulnérabilité de la technologie au brouillage ou la prise de contrôle à distance d’une arme par un hacker mal intentionné (voir mon article ici sur les cyberguns).

Il existe de nombreux moyens de sécuriser une arme (et la première est de ne pas en distribuer comme des jouets à tout le monde) ; Armatix a peut-être poussé le bouchon un peu trop loin, en imaginant une solution à un problème qui n’en est pas vraiment un. Ou alors, il fallait demander à Breitling de réaliser la montre, parce que bon, quand même…